Il est de ces artistes dont on ne peut faire l’économie pour comprendre l’évolution d’un genre musical. Comme Kraftwerk, Neu ou encore Can peuvent être indispensables aux électrophiles, impossible de ne pas écouter
Pete Seeger si l’on ambitionne de pénétrer le folk américain et de l’aimer avec raison.
Mais écouter Pete Seeger n’est pas une tâche forcément facile. En effet, en dépit de quelques rares rééditions, les albums du New-yorkais ne se récoltent pas à la pelle chez les disquaires. Rares aussi sur Internet, où notre tendre « mule » ne propose qu’une seule occurrence. Difficile écoute aussi, tant ses chansons peuvent nous sembler datées et lointaines la première fois. Des témoignages vifs d’un autre temps. Bien avant les Bob Dylan et autres Joan Baez, Seeger incarne la figure du « folk singer » engagé à la «
protest song » réaliste et incisive. Tout simplement un des pionniers du genre, compagnon de figures mythiques telles que Woody Guthrie et Leadbelly.
Pete Seeger naît en 1919 à New York, dans une famille habitée par la musique. Son père est musicologue, sa mère compositeur, et ses frères et sœurs chantent. Pete, lui aussi, est atteint du virus. Il entame cependant des études de journalisme à Harvard. Sans grande conviction… il quitte rapidement l’université et travaille à Washington, dans la librairie du Congrès. En 1940, il fait la rencontre de
Woody Guthrie lors d’un concert pour les travailleurs migrants et pendant deux ans, les deux hommes se consacrent ensemble à la musique. Seeger prend néanmoins le temps de rédiger un manuel de banjo et de créer un nouveau modèle d’instrument, aujourd’hui appelé « Seeger banjo ». Le jeune homme milite activement et est membre du Parti Communiste Américain, qu’il quittera en 1950, cinq ans avant le célèbre discours de Khrouchtchev.
Communiste donc, il est mis sur la liste noire maccarthyste et appelé à être entendu par la HUAC, la House of Un-American Activities Committee chargée de débusquer les traîtres rouges. Seeger refuse de se rendre à son audition et invoque le premier amendement de la Constitution, la liberté de réunion et d’association. Une originalité, quand tous les supposés agents soviétiques tentaient de se réfugier derrière le cinquième amendement, le droit à la vie privée et à la liberté. Pete Seeger est condamné à un an de prison mais réussit à se faire acquitter en appel. A la même époque il entame une carrière solo et compose rapidement les chansons qui lui vaudront sa notoriété : « Where have all the flowers gone ? », «
If I Had a hammer » (et oui, « Si j’avais un marteau »), « Turn, turn, turn » et « We shall overcome ». Par ailleurs, il chante aussi « Little boxes », une chanson de Malvina Reynolds sur les quartiers résidentiels. Une chanson familière aux amateurs de la série télé
Weeds.
Pete Seeger c’est un son chaud, d’un soleil grisant de Louisiane ou du Tennessee. Le son d’un homme qui a fréquenté les plus grands festivals de musique folk mais aussi écumé les campagnes américaines. Haranguant les foules de ses chants aux couleurs de liberté, se joignant aux militants afro-américains dans leur quête de droits civiques. Pete Seeger, en bref, c’est l’essence du protest singer, un des pères de la génération hippie américaine et une des idoles de Bob Dylan, faut-il le préciser.
Pete Seeger a sorti peu d’albums en dépit de son incessante activité musicale. En effet je n’ai pu trouver trace que de deux LP,
Studs Terkel en 1956 et
We shall overcome en 1978. Néanmoins, il apparaît sur de nombreuses productions et compilations, principalement dans les années 60 et compte à son actif de nombreux titres que l’on considère aujourd’hui comme des classiques. « Wimoveh », « We shall overcome » et « Hold on » sont autant de témoignages de pure musique folk, mariage harmonieux d’une voix racée et chaleureuse et d’une guitare sèche « countrysante ».
Hard travelling est un simple best of de Pete Seeger. En tant que tel, le disque n’est pas particulièrement intéressant mais pour qui ne connaîtrait pas encore ce grand monsieur de la chanson américaine, toujours actif par ailleurs, il s’avère être un parfait premier contact. Avant d’écumer les disquaires à la recherche des albums originaux...
Je n'ai pas pu trouver les titres que je souhaitais hormis "Turn turn turn", voilà ce que propose radioblog.