Sebastien Kocet est producteur de musiques électroniques en région parisienne. Il a créé son label, Loukoum Records, fin 2006 et compte déjà 13 artistes dans son "écurie". Petit entretien autour du métier de producteur et des changements provoqués par Internet.
Pour commencer quelle est la petite histoire de Loukoum Records ?
Sebastien Kocet : Loukoum Records fait de l'édition, de la production et de la distribution de musique électronique. La société a été créée en novembre 2006, dans la région de Paris. J'ai commencé par signer un artiste que j'avais écouté sur le site Jamendo, le site de musique copyleft. C'est un artiste électro qui s'appelle Gab Logan. Depuis j'ai signé 13 artistes sur Loukoum et j'ai produit, en tant que producteur exécutif, un maxi house, « Witches » de Superluxx, qui a été pressé et qui marche pas mal. Il est d'ailleurs en rupture de stock.
Loukoum ne vend que sur Internet ?
Pour le moment effectivement, je ne vend que de la musique « numérique ». Ce sont les plateformes de vente de musique en ligne, Virgin ou Djdownload par exemple, qui achètent mes titres. Ensuite elles les revendent à tous. Particuliers et professionnels de la musique comme les DJ. Mais mon objectif est quand même de m'orienter vers un support mécanique comme le vynil. Il y aura toujours des gens qui préfèreront le support mécanique, notamment les DJ pour mixer.
Pour toi, Internet a-t-il bouleversé le monde de la production musicale ?
Internet a invité les gens à travailler sur un autre support, dématérialisé. Ce qui génère forcément des économies. La distribution de musique a ainsi changé. Les stocks ne sont plus nécessaires et on réagit plus à la demande. Je ne crois pas cependant qu'Internet ait bouleversé complètement l'économie de la musique. Les majors ont investi le terrain du numérique et vendent de la musique en ligne. L'ingénieur du son est toujours présent. Tu vois, rien que sur le maxi que j'ai produit. Il y a eu trois mastering. Ca fait toujours partie du boulot des boîtes de production. Je pense qu'il y a encore une marge d'adaptation mais les majors vont évoluer. L'exemple de Kamini qui a avait fait une chanson en téléchargement libre et qui a été signé par Sony prouve cette adaptation ou du moins cette volonté de s'adapter. On observe aussi l'émergence de « net-labels », vendant de la musique numérique et parfois mécanique, mais ne travailllant que sur le support web.
Tu penses que les majors vont aller piocher dans le libre, comme dans un nouveau vivier à talents ?
C'est possible. Ce qu'il faut voir surtout c'est que la musique libre permet aux artistes de sortir plus facilement, de se faire connaître. Pour ensuite, signer sur un label. Internet nous permet, à nous producteurs, de connaître les créatifs. Souvent on s'extasie devant le nombre d'artistes amateurs qui font de la musique libre. Mais il n'y a pas plus d'artistes qu'avant je pense, c'est juste que le media Internet les rend visibles.
Est-ce tu crois qu'Internet peut avoir un effet uniformisateur sur la création musicale ? Genre chanter en anglais pour toucher un large public ?
C'est vrai qu'aujourd'hui beaucoup de nouveaux groupes français choisissent l'anglais, mais je ne crois pas que ce soit un effet pervers d'Internet. Simplement, Internet est un media, comme la TV ou la radio, et véhiculent des images. Il impose un style. Peut-être l'anglais fait-il partie de ce style.
Comment expliques-tu le succès de « Myspace » dans le milieu de la musique ?
J'ai connu Myspace à ses débuts, je me souviens. Le site s'est développé rapidement et touche un publlic très large et écclectique. Pour nous, labels, il nous permet de trouver plus facilement des producteurs de musique, des personnes qui font des sons intéressants. Le succès de myspace est qu'il est d'une utilisation simple et rapide. On peut mettre sa musique en ligne en quelques clics, y mettre son CV, ses contacts... En y ajoutant quelques scripts on peut créer une page stylée et sympa. De plus, c'est une communauté, musicale notamment, une sorte de microcosme. Forcément ça facilite les rencontres.
Avec la liberté et l'autonomie que permet Internet, le travail des maisons de disques n'est-il pas en danger ?
Je ne le pense pas. D'une part car il y a toujours besoin de supports mécaniques et de plus les majors ont investi aussi le terrain du numérique. Et ne sont donc pas à la traîne. D'autres part car la production nécessite du savoir-faire. Il y aura toujours une phase mastering dans la production musicale. Cette phase c'est le domaine des maisons de disques et des labels. Ensuite, la fabrication de vynils et de cd nécessite des filtres spéciaux. Un autre domaine de compétence de la production. Les boîtes de prod' ne sont pas en danger, mais elles vont certainement évoluer.
Propos recueillis par fab.
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