25 novembre 2007

Twisted Charm - Real Fictional (2007)


Autant l’avouer tout de suite, ma découverte de cet album a été fastidieuse et même déplaisante. Le côté brit-pop adolescente des Twisted Charm m’a d’abord rebuté. Et aussi l’impression d’entendre, par moments, des sous-Klaxons surfant insolemment sur l’ample vague fluo qui semble emporter tout sur son passage sans que je comprenne bien pourquoi. Mais la persévérance a payé et, au fil des écoutes, j’ai succombé au “charme tordu” de ces londoniens originaires de Rusden, dans le Northamptonshire (“L’enfer sur terre, un lieu sans vie et sans âmes avec beaucoup d’enfants attardés”, dixit le chanteur, Nathan Doom).

En fait, Real Fictional passerait inaperçu s’il ne bénéficiait pas d’une production hors pair. C’est Lance Thomas, collaborateur de Ladytron et PJ Harvey, qui donne toute son âme au disque. Il opère un traitement électronique discret qui laisse intacte l’énergie punkisante des compositions, et parvient à équilibrer les éléments épars d’une musique qui part dans tous les sens : basse dépressive à la Joy Division, synthés nébuleux et pulsions free du saxophone de Luke Georgiou.

On pense au mariage contre-nature de l’univers synthétique et désincarné de Devo et des rythmiques ska de Madness et The Specials, sous la bénédiction d’un révérend cold-wave. La netteté des arrangements n’exclut pas une certaine saleté du son qui évite à quelques morceaux de sombrer dans la pop de supermarché.

Souvent assimilés aux Klaxons, dont ils ont assuré la première partie, les Twisted Charm n’approchent qu’occasionnellement (Never grow older ou l’excellent single Boring lifestyles) la puissance du phénomène anglais de l’année, mais développent un univers plus fragile, plus bancal et finalement plus attachant. On a moins l’impression de faire face à une machine de guerre catapultant tube sur tube que de pénétrer un garage rempli de freaks se perçant les boutons en étalant leur désoeuvrement.

Si les paroles s’axent pour l’essentiel sur une critique de la société de consommation sans grande originalité (Phoney people, Clone Baby, Television Nation...), la poésie et surtout le cynisme de certains textes sont délectables. This is the London Scene ne manque pas d’auto-dérision, comme si la bande sciait la hype sur laquelle elle est assise. Cinema rend curieusement hommage à Kieslowski alors que Jealousy conclut l’album sur une introspection impitoyable : “Your Jealousy is so ugly” répète Nathan Doom, comme s’adressant à lui-même.

Les Twisted Charm ne changeront certes pas la face du monde, ni de la fameuse scène londonienne. Avec leurs fringues flashy, leur pochette crayonnée et leurs références à J.G. Ballard et au post-punk, ils pourraient d'ailleurs n’être que d’énièmes émanations d’un buzz comme seuls les anglo-saxons savent en monter. Heureusement, il n’en est rien. Un songwriting intelligent et une configuration originale - avec notamment la place centrale laissée au saxophone, choix plutôt étonnant pour un tel groupe - font de ce premier long-format un objet singulier, à la fois ultra-fashion et éminemment nostalgique. De quoi faire tomber bien des préjugés.

En bref : de la pop anglaise teintée de saxophone pour un premier album plutôt réussi.


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