C’est vrai, c’était il y a deux semaines, mais j’ai eu une bronchite si vous voulez tout savoir, et puis il faut quand même que je vous en parle, de ce festival de l’Ososphère... Ce n’est certainement pas la faute des organisateurs si cette édition 2008 n’a pas été un total succès. Tout était pourtant là pour casser la baraque: un site toujours aussi beau, d’une urbanité on ne peut plus adaptée aux sons électroniques, une organisation au poil et une programmation foisonnante balayant un large spectre des musiques nouvelles, du post-punk de Wire à la tech hardcore en passant par le hip-hop et la drum and bass. Non, vraiment, c’est bien de la faute de certains des artistes inscrits au programme si nous n’avons pas totalement pris notre pied.
Incriminés, entre autres, Sascha Funke (en roue libre), Gregor Tresher (aussi plat et inhabité en live qu’il est planant et profond dans ses disques), et un dancefloor Ed Banger sans surprise malgré le bon set de SebastiAn, qui eut la bonne idée de balancer l’hilarant nouveau single de Mr Oizo, “Positif”. Au final, l’électro banger saturé aura dominé très nettement, de Boys Noize à un Etienne de Crécy plus fluo qu’à l’accoutumée, pour le plus grand bonheur des kids, venus en masse cette année. Il aura donc manqué à cette onzième édition, pour être vraiment représentative de la planète électronique, un peu de sensualité, de musicalité - peut-être un peu de deep-house ?
Ceci étant dit, quelques très gros noms étaient là pour nous rassurer, à commencer par Wire (photo ci-dessus) et son leader Colin Newman très en verve. Leur set pop-punk sans fioritures, concentré sur les titres du dernier album, Object 47, prit une belle ampleur, à tel point que j’en oubliai d’aller voir Pivot, dont Ju vous a si bien parlé il y a peu (lire). Le temps d’entrevoir un Axel Bartsch très minimal et peu inspiré, et c’est déjà l’heure du grand Dave Clarke, qui accélère le pouls d’un Molodoï déjà au bord de l’asphyxie. Le Britannique, très agressif, livre un mix de techno pure, avec montées à l’ancienne et vrilles acides en pagaille. Et s’il a très peu produit ces dernières années, il rappelle qu’il est toujours dans le top 10 des meilleurs DJ du genre. Sans grande surprise mais avec la même efficacité, un autre monarque investira la même salle à la même heure le lendemain : Roni Size, le parrain de la scène drum and bass, qui s’y entend à merveille pour cuisiner les hits du moment à sa sauce, le meilleur exemple étant cette réappropriation du “Everyone Nose” des N.E.R.D. (“All the girls standing in a line from the bathroom...”).
L’autre gros événement du week-end, c’était De La Soul en live. Et là, personne n’a été déçu, le trio au mieux de sa forme interprétant ses classiques d’hier et d’aujourd’hui en interaction totale avec un public strasbourgeois qui l’attendait de pied ferme. Saul Williams en a quelque peu pâti, lui qui était programmé exactement au même moment. Son set valait pourtant le déplacement. Pour moi qui ne m’étais pas penché sur son cas depuis son premier album, le New Yorkais était encore cet élégant poète qui déclamait ses textes sur des beats hip-hop ou drum and bass. Autant dire que j’avais manqué un train. Car Williams donne désormais dans un rock industriel punky propice au décrassage d’écoutilles, son troisième album, The Inevitable Rise and Liberation of Niggy Tardust, ayant été co-produit et co-écrit par Trent Reznor de Nine Inch Nails. Des plumes bleues plantées dans sa crête, le slameur se contorsionne façon Iggy Pop entouré d’un backing band arborant des costumes délirants, la palme revenant au préposé à la boîte à rythmes, vêtu d’une extraordinaire veste à épaulettes cuirassées qu’on croirait piquée à Mister T. Le pic de la performance sera atteint avec le hit “Black Stacey”, son rythme irrésistible et ses paroles provocantes (“Do you think i’m too black ?”). L’un des grands moments du festival, malgré une évitable reprise de “Sunday Bloody Sunday”.
A l’autre bout du site, les Platinum Pied Pipers sont en retard, ce qui me permet de ne pas rater une goutte de leur live. Nous ne sommes qu’une poignée à acclamer Waajeed et Raphael Saadiq lorsqu’ils font leur entrée, accompagnés par deux choristes et un batteur. Leur venue est pourtant un véritable événement et l’occasion d’entendre les titres d’Abundance, leur deuxième album à paraître début 2009. Ils commencent d’ailleurs, après une intro un peu brouillon, par leur nouveau single, le très soul “On a Cloud”, qui ferait presque penser à Amy Winehouse. Un seul autre inédit et les PPP quitteront la scène après seulement quarante minutes, certes délicieuses (la reprise du “Ridin’ High” de Faze-O avec un Saadiq virtuose à la basse), mais surtout très frustrantes.
Enfin signalons l’excellent show de connaissances à nous, les décidément sous-estimés Think Twice. Croisé auparavant dans les loges, le groupe me raconte ce qui a changé depuis notre dernière interview : “Nous sommes désormais cinq dans le groupe, explique Jean-François Couderc (claviers, machines). Anton, à la guitare, et Mathieu à la batterie ont été ajoutés au line-up pour rendre notre son plus plein, plus organique. Mais ils ne sont pas uniquement là pour la scène, ils font maintenant partie intégrante du groupe et prennent part aux nouvelles compositions. Le but c’est aussi de s’éloigner un peu de la scène club : récemment notre DJ set a mieux marché que nos lives, et on veut changer ça.” Le futur proche de Think Twice, ce sont de nouvelles chansons “plus électro”, même si Macdara Smith s’amuse à dire qu’“il faudrait monter un groupe de rock chrétien libéral pour sauver Wall Street”. Avec sa petite veste grise, le chanteur irlandais a des allures de dandy. Ce sera d’autant plus surprenant de le découvrir sur scène vêtu d’un superbe slip kangourou rouge, de chaussettes grises et d’un bracelet de force, hurlant “Education, Masturbation” à un public interloqué. Rien que pour de tels moments, on retournera à l’Ososphère.
Merci à Antoine pour son aide, à Anne-Sophie et à Olivier Legras pour ses photos.
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