Le précédent album de Polly Jean White Chalk était un album enchanteur, et unique dans l'oeuvre de la native du Dorset, puisque entièrement composé au piano.
L'album n'a sans doute pas eu l'écho qu'il méritait, et est sans doute perçu comme une parenthèse dans l'oeuvre protéiforme de la belle, habituée il est vrai, à passer d'un style à l'autre, au gré des livraisons de ses LP's.
Ici, retour à l'électricité si chère à notre harpie préférée, la "nouveauté" étant si l'on peut dire, que ce 9ème opus (hors compiles), est le deuxième signé à 4 mains, dont celles du fidèle compagnon d'armes, j'ai nommé John Parish, avec qui avait déjà été signé l'excellent Dance Hall At Louse Point (1996). De toute façon, le guitariste, qui fait un peu aussi office de mentor de la dame, n'est jamais très loin.
Musiques pour monsieur, paroles pour madame, qui avait annoncé vouloir faire sonner sa voix aux antipodes selon les morceaux : ainsi de la voix autoproclamée de petite fille faussement candide sur les magnifiques "Leaving California" ou "The Soldier" qui ne sont d'ailleurs pas sans rappeler les meilleures plages de White Chalk, à la voix de vieille sorcière boutonneuse de "April", il n'y a qu'un pas.
Pour le reste, PJ Harvey, qui s'affirme de manière éclatante comme une chanteuse majeure de son temps, fait souffler le chaud et le froid sur un album, à l'évidence loin d'être son meilleur, et qu'on eût aimé moins décousu, moins "compile" de ses humeurs. C'était un peu déjà le cas sur la précédente collaboration avec Parish, mais Dance Hall... avait au moins le mérite d'une inspiration plus homogène, et sans doute d'une production "à l'os", sans doute moins clinquante, mais plus humble.
Alors, c'est vrai que le "Black Hearted Love" qui ouvre le disque et sans doute destiné à devenir un single roboratif, en fout plein les yeux, par son côté brûlot vengeur tout de noirceur romantique mais... on s'ennuie ferme sur certaines plages où PJ singe un Nick Cave au féminin sur les bordéleux "Sixteen, Fifteen, Fourteen", "Pig Will Not", ou sur le titre éponyme. Le blues ne sied certes plus trop à la dame.
Par moment, cet album rappelle même le pire album de l'anglaise, ce Is This Desire ? (1998), bêtement saturé et rentre-dedans ; ailleurs, l'auditeur est confronté à de très beaux moments. Avec une voix dont les accents épousent de plus en plus ceux d'une Siouxsie Sioux passée maîtresse dans l'art du lyrique, l'indomptable PJ livre un disque trop rapproché par rapport au précédent, et condamné à errer à l'ombre du firmament de celui-ci. Malgré tout, la dame pond un album, et on achète par pur atavisme ; c'est comme ça. Au milieu, se glissent c'est vrai, quelques chefs-d'oeuvre.
En bref : un nouveau disque en demi-teinte, qui alterne grands moments et plages très anecdotiques. Pas un disque important ni même de transition, simplement une oeuvre mineure pour une artiste au sommet de son art vocal.
La video de "Black Hearted Love"
2 Comments:
"Pire album, bêtement saturé et rentre-dedans", "Is this desire ?" ? C'est mon préféré (avec "Dance hall at louse point") et tout le contraire de ces qualificatifs à mon sens. A-t-on écouté le même ? PJ a au fil du temps cessé de m'intéresser, après son très (trop) mainstream "Stories..." de 2000.
François
J'ai assisté au lancement de ce disque joué quasi intégralement au FIB de 1998 (Festival International de Benicassim). Le son bastonnait déjà avec des infrabasses pas possibles. Je ne pensais pas qu'ils se hasarderaient à refaire ça sur le disque à paraître.
Alors, certaines chansons sont très bien ("Angelene", "A perfect day Elise"); mais ce son saturé est assez pénible.
A l'arrivée, un album mineur et sans grand intérêt. Je préfère largement Dance Hall At Louse Point que tu cites qui lui a été franchement déprécie.
Post a Comment