Sonic Youth le groupe, serait donc plus important que ses disques. A bien y réfléchir, ce pourrait être la formule idoine pour résumer la carrière atypique et parfois controversée du quatuor new-yorkais. Car finalement, y a-t-il dans la discographie foisonnante du combo bruitiste un disque, une période qui se détachent véritablement ? à tout le moins, l'album qui mettrait tout le monde d'accord ?
Les connoisseurs ont tendance à citer Daydream Nation (1988), album inécoutable s'il en est ; et pourquoi pas Sister, d'ailleurs, issu de la même époque (1987) ! Il y a aussi les adeptes de la période plus produite, plus léchée, qui inclut Goo (1990) et Dirty (1992), choix pertinent évidemment... pour ma part, j'avouerai une préférence pour Washing Machine (1995) et A Thousand Leaves (1998) ; on le voit, on n'en sort pas.
Alors pourquoi nous faire croire que cet album, le 16ème en studio, pourra être celui qui mettra tout le monde d'accord, au moment où Sonic Youth délaisse, après un long partenariat, la maison Geffen fourre-tout pour la plus indie-rock Matador de leurs camarades de jeu, les brillants Yo La Tengo ?
Parce qu'on en revient à un son plus carré, moins bêtement lo-fi, façon Goo ? Hmmm....pas suffisant ! Car si ce nouveau disque n'est pas moins bon (ou plus mauvais) que Murray Street (2002), Sonic Nurse (2004) et Rather Ripped (2006), les trois derniers albums avec Jim O'Rourke (qui a quitté le navire depuis), il n'a pas de quoi leur en remontrer non plus.
Car franchement, que nous apprend The Eternal ? Que Steve Shelley est un excellent batteur, c'est même le musicien le plus convaincant de la bande ; mais ça, on le savait déjà ! Il a le mérite de le prouver une fois encore sur "Sacred Trickster" et "Anti-Orgasm" qui ouvrent tous deux l'album sur les chapeaux de roue. Mais dès "Leaky Lifeboat", c'est la cata : on a droit à des "la-la-la" du couple Thurston/Kim qui, on s'en doute, feront moins date que ceux de Ira et Georgia (Yo La Tengo), comprendre qu'on les fredonnera moins volontiers sous la douche.
Alors, bien sûr, il y a la rythmique qui bastonne, les guitares qui cisaillent et s'entrecroisent sur des "Antenna" ou "No Way" qui doivent beaucoup aux chevauchées électriques du Crazy Horse du Loner ; mais enfin, il faut quand même s'envoyer un nombre de morceaux parfaitement anodins, quand ils ne sont pas pénibles ("Massage The History", soi-disant le sommet du disque, faudra qu'on m'explique !?) avant de tomber ENFIN sur une chanson mémorable, façon "Kool Thing", "The Diamond Sea", ou un "Karen Coltrane" d'antan, et c'est ce formidable "Walkin Blue" et son épatante mélodie binaire, que Lee Ranaldo (pas fou) s'octroie
Et là Sonic Youth de rappeler, qu'au-delà du groupe arty prise de choux qu'il peut être aux yeux de ses détracteurs - voir à ce sujet l'article manquant de finesse du pourtant excellent Ungemuth dans le R&F # 503- il sait incarner aussi ce band humble qui, en oubliant de désaccorder ses guitares, compose des chansons pop parfaites. Fait d'armes devenu rare chez SY, et qui tend au syndrome slow hand : les anglophones onanistes comprendront.
le site, le Myspace
La video de "Sacred Trickster" :
2 Comments:
le texte d'Ungemuth dont tu parles m'a paru affligeant de dogmatisme rigide, je suis bien d'accord avec toi ; et pourtant je sais combien tu tiens en estime certains groupes qui ont su borner leur horizon esthétique au format chanson, sans prétendre à des formes plus savantes de musique. Je n'ai pas d'opinion sur the eternal parce que je l'ai écouté une fois pendant mon footing, mais en revanche je suis un inconditionnel de daydream nation (cross the breeze me renverse)
bises
J
L'érudition et le bon goût d'Ungemuth ne sont pas à remettre en cause ; en plus, on se doute bien que cet adepte hardcore de la chanson couplet/pont/refrain, ne porte pas dans son coeur SY.
Et puis, il y a aussi ce sens du papier provoc et dérangeant, gorgé d'humour tonitruant qui est un peu sa marque de fabrique -voir le papier où il taille un short aux "pires groupes de l'histoire du rock" (et y'a matière...) ou quand il règle leur compte aux piteuses années 80, enfin la première moitié notamment.
Son article sur SY fera réagir, c'est sûr, mais il est dommage que cette fois-ci, l'entreprise de cassage systématisme, en oublie l'essentiel à savoir une évaluation objective de Sonic Youth.
Ce que j'essaye de faire, fusse par le truchement d'un album qui m'a déçu !
Car je pense qu'on peut tout à la fois se réclamer de l'avant garde et des Shangri-La's, enfin perso ça ne me pose aucun probléme !
Bises
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