05 septembre 2010

Liars - Sisterworld (2010)

Sous une magnifique pochette en relief, embossed comme ils disent, voici le 5ème Liars, trio inclassable et avant-gardiste s'il en est. Le sens de l'expérimentation qui avait culminé avec le chef d'oeuvre conceptuel Drum's Not Dead (2006) est un tantinet remis au goût du jour ici, après une parenthèse presque académique et plus traditionnellement indie (Liars en 2007) - enfin, bien dérangeante, quand même.

Dès les premières notes de violoncelle les gémissements plaintifs, la voix mourante d'Angus Andrew dont le timbre évoque un Nick Cave endeuillé, (curieuse analogie qui éventuellement se prolonge sur le physique, sont-ce les gênes australiens qu'ils partagent ?) nous mettent sur la voix d'une nouvelle oeuvre "difficile", à tout le moins où la notion de mélodie primesautière ne prédominera pas forcément.

C'est effectivement ce qui se passe à l'aune de ce "Scissor" et de ses lyrics sinistres ("I found her with my scissor..." gruesome !). En comparaison, "No Barrier Fun" qui lui succède, elle aussi nappée de cordes, ferait presque office de single potentiel ; on y trouve ainsi au détour de la mélodie du couplet un célesta, tant qu'à faire utilisé à contre-emploi. 
Les sonorités menaçantes et tordues sont donc à l'honneur tout au long de cet opus, avec cette obsession du mantra qui caractérise bien l'univers de Liars, cette affaire tribale où l'on jurerait ici entendre un digeridoo de circonstance ("Drip"), références aborigènes obligent. 
La reverb claque sur le délicieusement psychopathe "Scarecrows on a Killer Slant", titre que n'aurait pas désavoué le mythique créateur de Calvin & Hobbes ! Ailleurs, dissonances toujours ("Here Comes All The People", "Drop Dead" - au moins, c'est dit !). Dans ce maelström sonore, Liars est toujours capable de fulgurances mélodiques ; il sait en tout cas soigner ses gimmicks, ses intros y compris lors de ses morceaux les moins indulgents pour l'oreille ("I Still Can See An Ouside World", "The Overachievers", "Goodbye Everything").

Assez naturellement, et comme il l'avait déjà proposé sur Drum's Not Dead, le trio termine son périple sonore par deux titres en demi-teinte, l'obsédant riff de "Goodbye Everything" relevé dans son final de cuivres au ralenti, et ce "Too Much Too Much" aux faux airs mélancoliques. 
Plus que jamais, Liars semble incarner la version moderne d'un Sonic Youth, qui prendrait lui le parti de se renouveler dans la continuité. Liars trace mine de rien une oeuvre étonnante, à nulle autre pareille, dont l'impact rythmique et osons... mélodique, prenons-en les paris, en assureront la pérennité discographique.


En bref : une nouvelle pierre à l'édifice anguleux et atypique de Liars. On aime ou on déteste, mais on ne saura en nier ni la radicalité ni l'intégrité. De l'expérimental envers et contre tous, définitivement libre et affranchi de toute contrainte, euh... radiophonique.



Le site officiel et le Myspace

"Scissor" :


2 Comments:

Ju said...

Ah bin enfin le retour du Nickx ! Il faudra que je me repenche sur ce disque parce que je suis passé vite fait dessus..

Bises!
Ju

M.Ceccaldi said...

Pas facile de chroniquer un album pareil ! chapeau!
J'aime tout ce que les Liars ont fait, et en live, il m'ont plutôt impressionné, ça sonnait vraiment bien, et le chanteur avait les yeux révulsés comme il faut.
la pochette de ce dernier album est une profession de foi d'hermétisme, non?, avec son trésor enfermé et accessible uniquement à ceux qui voudront bien utiliser la clé.
bises
J