28 décembre 2011

Death In Vegas - Trans-Love Energies (2011)

Sept ans que Richard Sanspeur ne nous avait rendu visite. Pour son nouveau forfait, après un LP en forme d'hommage et de citation des maîtres Kraftwerk ("Satan's Circus"), Fearless et son avatar Death In Vegas jouent à nouveau la carte de l'épure. S'il n'est pas entièrement instrumental comme son prédécesseur, Trans-Love Energies a au moins le bon goût de ne plus convoquer chanteurs brit à tout va, ce qui rendait parfois illisible sa démarche à l'image de ce que pouvait donner son vilain pendant de Chemical Brothers, ou à un degré moindre les "groupes" à géométrie variable que sont les Archive ou Massive Attack.

Séparé de son alter ego Tim Holmes, Fearless conduit en solo et pour la première fois de manière ostentatoire ce nouveau disque, assumant lui même l'intégralité des quelques parties chantées.

L'ambiance générale n'est pas sans rappeler l'ambient d'un Aphex Twin circa 93/95 - sa meilleure période, on ne s'en plaindra pas - ainsi va l'inaugurale et sombre "Silver Time Machine", étirée et obsédante. "Black Hole" qui lui succède dans un fade in savant ne déparerait pas au sein des lugubres délices du Closer de Joy Division.

Parmi les autres réussites, les ambiances cafardeuses du répétitif "Lightning Bolt", la transe syncopée de "Coum" sont les pistes les plus réussies de ce Trans-Love Energies, assez caractéristiquement d'ailleurs celles où la voix blanche et monocorde de Fearless est omniprésente. En revanche, les remix ou versions différentes proposées en bonus sur le double vinyle sont assez pesantes voire gonflantes, et c'est finalement dans la concision que monsieur Death In Vegas convainc le mieux, dans ce qui reste son disque le moins sexy (comprendre racoleur), mais sans doute le plus cohérent à ce jour.

En bref : sans peur et sans binôme, Richard Fearless revient à un son plus dark, avec un disque qui gagne en cohérence dans les climats et la conception, débarrassé qu'il est du casting par trop envahissant de ses prédécesseurs.





le site, le Myspace

"Black Hole" :



"Lightning Bolt" :



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27 décembre 2011

Michel Cloup (Duo) - Notre Silence (2011)

Pour la génération avant la mienne, Diablogum reste un groupe mythique au sein du paysage francophone. Honte sur moi, je n’y ai mis les pieds plus que de rigueur. J’avais bien effleuré quelques fois un disque comme #3 mais jusqu’à cette année, jamais je n’étais tombé amoureux de leur univers. C’est aujourd’hui chose faite grâce à ce disque sorti hors circuits, qui doit la seule petite lumière médiatique qu’il a reçu à son patronyme honorifique. Et puisque le retour sur les planches et dans les bacs du plus culte des groupes français se fait attendre, quoi de mieux pour patienter que cet ovni slow-core, produit purement français et pourtant tellement américain.

Comme son nom l’indique, cet album est joué en duo. Guitare/voix/batterie. Michel Cloup (Experience, Binary Audio Misfits) + Patrice Cartier. Pas plus. Ni moins. Un choix pour le moins minimaliste, qui privilégie l’épure aux dépends de la sophistication. Tout comme la pochette noir et blanc aux relents de BYG Actuel. Tout comme le phrasé parlé jamais crié. Et puis il y a ce son grave et chaud de la guitare barytone. Tout contribue à cette lente et courte introspection. Cette mise à nu d’un artiste oublié sur le bord de la route et qui a encore des choses à dire. "Une histoire, mon histoire. Universelle, banale. Mon histoire, notre histoire", tel commence ce disque solennel d’à peine six véritables morceaux.

Michel Cloup y est à vif. Les thèmes sont lourds : l’enfance, le deuil, la dépression, la douleur, la fatalité, le tout avec un regard quadra mélancolique à souhait. Sans jamais verser dans le pathos, avec peu de mots et en imageant comme un poète, Michel Cloup frappe sec et fort sans chichis. "Expliquer l’inexplicable, pour accepter l’inacceptable" lâche-t-il dans "Cette colère", premier coup de force du disque. Un de ces je ne-sais-quoi qui laisse des frissons sur son passage, entre rage et amour.

Sa guitare est son autre grande force. Typiquement américaine mid-90’s côté Slint et Shellac. Des soli juste comme il faut et un son écorché mais précis qui s’étend sur de relativement longs morceaux. Sommet du disque, et meilleure chanson de l’année pour moi, "Notre enfance" reflète en cela tout ça. Il y a tout. La longueur (12 minutes), la présence, les breaks, le sens, la charge émotionnelle, l’histoire. Notre histoire.

En bref : pesant et dépouillé, Notre Silence est un regard unique sur la vie, d’un classicisme et d’une sobriété folle. Un soleil noir.





Le site officiel

"Cette colère" :





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19 décembre 2011

Keren Ann - Espace Julien- Marseille (17/12/11)

Madame Nickx et moi nous sommes fait une spécialité des "dernières" ; c'est donc à l'Espace Julien qu'accompagnés de Nickx Junior, nous avons rendez-vous avec Keren Ann pour l'ultime date de sa tournée 101 ; mais revenons aux préliminaires.

De Daho à Bashung

Combien, à part votre serviteur, auront reconnu l'accompagnatrice de Doriand (avec un "D"), support artist de la jolie franco-néerlandaise ? Car il s'agit bien en effet de l'ex-meneuse des cultes et très délicats Valentins qui officie à la guitare folk, seul oripeau instrumental du mini-set, si ce n'est le tambourin agité frénétiquement en final des morceaux par le chanteur dandy.

Lequel ne se prive pas de rappeler (merci à lui) les exceptionnels états de service d'Edith Fambuena en variété pop française (de Daho à Bashung, en passant par.......à peu près tout le monde) qui, bien qu'abîmée par les années, n'a rien perdu du charisme qui avait fait d'elle l'ex-égérie de la nouvelle vague gay romantique du début des 90's.

Et à la vérité, c'est presque d'elle dont on le plus envie de parler, plus que de Doriand, au demeurant chanteur néo-réaliste aux histoires drôles et tendres, jamais très loin d'un Renan Luce, et sans doute plus attachant que toute la cohorte d'affreux Benabar de la terre !

Louise Brooks, Mireille Mathieu et Carla Bruni

Place à Keren Ann dans une salle qui c'est un comble, ne l'est pas, avec le parti gonflé de lancer le set après avoir balancé le title-track lancinant de 101, juste avant de monter sur scène. En formation resserrée, la belle Keren a donc décidé d'abandonner la très discutable coupe de cheveu à mi-chemin entre Louise Brooks et......Mireille Mathieu qu'elle arborait sur la superbe pochette du dernier album.

A présent, sa silhouette moulée dans le cool d'un fut moulant et de la veste rock'n'roll de rigueur, évoque davantage une Carla Bruni branchée, et c'est tant mieux.

Le groupe de 4 musiciens, particulièrement efficace propose batteur, sosie de Sinclair à la basse, clavier et ô joie rien de moins que Philippe Almosnino, échappé des Wampas, dont le jeu virevoltant insufflera à "Sugar Mama" et certaines vieilles scies telles "It Ain't A Crime", une seconde jeunesse. Keren, d'humeur très accorte, fait de longs commentaires sur les chanteurs peints sur les murs de l'Espace, se félicitant de figurer aux côtés de Dee Dee Bridgewater et s'autorisant une saillie réitérée envers Booba et Diam's, qu'elle se désole (?) de ne pas côtoyer (LOL).

Son maousse, voix diaphanes...

Un sobre éclairage aux tons violets sied particulièrement à la mélancolique et magnifique "Strange Weather" qui lance les hostilités. Le son est maousse, la voix en pâtira d'ailleurs parfois, mais ça n'est pas grave. C'est à un véritable best-of de sa déjà conséquente discographie que convie Keren ; tous les morceaux qui comptent seront joués, avec une part belle faite évidemment à 101. Dont les morceaux de bravoure hormis la chanson-titre, sont tous interprétés. Nos préférés ? Outre la chanson d'ouverture, un très beau "You Were On Fire" délicatement saupoudré de Theremin, et sur lequel Keren évoque feu Trish, la chanteuse des hélas méconnus Broadcast.

Ca n'est d'ailleurs pas le moindre des mérites de la muse néerlandaise que d'évoquer les voix diaphanes les plus prisées des années 90/2000 ; on pense aussi à l'adorable Hope Sandoval sur "All the Beautiful Girls" et la rêveuse "Song From A Tour Bus".

Traitement club...souvenirs feutrés

Si l'on devait retenir une caractéristique de la prestation de Keren Ann ce samedi, c'est l'absence de faute de goût, tant dans le choix de ses accompagnateurs ; qu'il s'agisse de ses propres musiciens ou de la première partie. Ou de façon plus subjective, de celui du répertoire interprété, qui atteint son apogée après le rappel.

Auparavant la tant attendue et tourbillonante "My Name Is Trouble", jouée en 12ème position aura droit à un traitement club : après un début classique, ce ne sont que guitare funky et basse slappée étirées sous de roboratifs stroboscopes, avec faux départs, vrais redémarrages, et Keren qui prend la pose oiseau de nuit sur le dance-floor !

Feu d'artifice final, les deux plus beaux titres du fantastique Not Going Anywhere (2003), le morceau-titre bien évidemment, et aussi le grandiose "Sailor And Widow" (ma préférée entre toutes), où la voix de Keren -qui officie derrière la batterie pour l'occasion- n'a jamais tant évoqué nos souvenirs feutrés de la grande Suzanne Véga.

Vivement le prochain album !

"Strange Weather" en ouverture du concert



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17 décembre 2011

Korallreven - An album by Korallreven (2011)

Que l’on appelle ça chillwave ou que l’on ne l’appelle pas, on ne peut que constater que nous avons ces dernières années été submergés par une vague de disques jouant avec les ambiances aqueuses et aériennes, en entrelaçant boucles électroniques, notes de synthé et voix éthérées. Les premiers disques reçus, inattendus et révélateurs (je pense notamment au seul, unique, et sublime EP des suédois d’Air France), semblaient tomber du ciel, portés par le vent. Objectif manifeste : créer du beau. Et amener l’auditeur à se détacher des lois de la pop et de la pesanteur. Seulement voilà : en lisant la presse, on aurait pu croire que 2011 allait être l’apogée du genre. Or, que j’écoute, simple exemple, Washed Out ou Neon Indian, je ne pense qu’une chose : Pffff. Comme un ballon qui se dégonfle, et qui échoue platement dans l’océan. Où les vagues perdraient de leur fluidité à force de courants contraires. Où dans « flotter » j’entends « flotch, flotch ». C’est pourquoi je suis heureux, en cette fin d’année, d’entendre un disque enfin accomplir ses ambitions élémentaires et oniriques. Cela n’étonnera personne, il vient de Suède. Il s’appelle An album by Korallreven. Et aux commandes, on note la présence du claviériste de The Radio Dept, groupe dont on ne vante plus les qualités.

On a beau reprocher aux journalistes de vouloir créer des genres out of the blue, tout concourt, sur cet album de Korallreven, à définir un canon, en accumulant des éléments devenus caractéristiques comme autant de figures imposées. On a ces références aux contrées exotiques (Korallreven signifie « récif de corail ») et fantasmées. Et surtout, on a ces grandes envolées lyriques et ce savant collage réverbéré de voix humaines, de bruissements naturels, de sons synthétiques et de boucles électroniques, si bien que l’on pense autant à Brian Eno qu’à The Avalanches. Et quand je dis savant, je ne pense pas nécessairement à une maîtrise métronomique manifeste ou à une précision d’artificier. Non, il s’agit ici de réussir à superposer les strates de sons pour leur donner une apparence accidentelle, à imiter les mouvements naturels, à donner l’illusion d’une musique dépendante des courants de l’air et des courants de l’eau. L’impression de flottement…

Et si Korallreven réalisent mieux que d’autres leurs ambitions impressionnistes, c’est parce qu’ils ont envisagé leur album comme un tout, brouillant non seulement les lignes à l’intérieur des morceaux, mais aussi entre les différentes pistes. Si bien que l’on ne sait jamais vraiment où l’on en est : ne cherchons pas, on est transporté. Le disque terminé, reste une impression d’avoir quitté l’espace et le temps, sans parvenir à définir ce que l’on vient d’entendre : la sensation d’avoir rêvé. On se souvient d’une entrée en matière céleste et épique, sur deux morceaux encore à peu près identifiables. On se souvient aussi des voix de Victoria Bergsman (Taken by Trees) et Julianna Barwick. Puis il semblerait que l’on se soit laissé capturer, emporter dans une série de rêves imbriqués les uns dans les autres : « A dream within a dream within a dream within a dream » : cette voix résonne encore... On se souvient d'échos qui semblaient se répondre et se répéter d’un bout à l’autre du disque, comme si la musique créait des espaces qui se dépliaient et se repliaient sur eux-mêmes, à l’infini… Et lors des dix dernières minutes, celles qui précèdent le réveil, on se souvient avoir entendu le tempo ralentir, tandis que les espaces se multipliaient ; il s’agissait pourtant d’une seule et même plage, puisque, dans le trouble et le doute, on aura vérifié… Écoute après écoute, d’autres souvenirs refont surface. Les autres restent enfouis sous des strates encore inexplorées, attendant que l’on replonge pour les chercher.

En bref : un album de chillwave, impressionniste, séduisant, électronique, complexe, aérien, onirique, délicat, inspirant, exotique.





Le Myspace et le Soundcloud

"As young as yesterday":



Et "The truest faith":



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13 décembre 2011

King Krule - King Krule (2011)

Qu’on se le dise, King Krule, de son vrai nom Archy Marshall, a seulement 17 ans et débute son projet solo après avoir officié en tant que Zoo Kid. Issu d’une famille de musiciens, c’est à 8 ans, selon les dires, qu’il compose son premier morceau et découvre ses aptitudes au songwritting. Autant dire que la pop ça le connaît, lui qui a déjà un maxi au compteur (Out Getting Ribs) et signe ici son premier EP éponyme chez True Panther (Morning Benders, Real Estate, Teengirl Fantasy). Ses prestations scéniques, au Midi Festival d'Hyères et à la soirée d’ouverture du Pitchork Festival à Paris notamment, ont eût tôt fait de lui assurer un premier succès d’estime.

Abstraction faite de son jeune âge et de sa maturité vocale précoce, on a ici affaire à un vrai disque de pop hybride aux accents ambient et jazzy. La voix d’Archy Marshall, suave et envoûtante, surplombe une instrumentation éthérée et minimaliste : guitare nimbée de reverb, basse profonde, batterie lo-fi à la frappe légère. Son chant (plutôt du parler-chanter) a un timbre mélancolique particulier qui prend de la consistance lors de ses accès de violence, sans jamais succomber à un excès d'émotions. Loin d’être omniprésent, le chant sait se faire discret sur "Bleak Bake", laissant la place à des textures vaporeuses. Il est même absent sur l’introductif "36N63" et ses lignes de contrebasse.

"The Noose of Jah City", en guise de final est sans conteste le sommet de cet EP. Il semble télescoper toutes les (bonnes) inspirations d’Archy Marshall pour en former un morceau plus abouti. Parmi les échos de guitare et le chant écorché qui ne cesse de dévoiler une certaine anxiété juvénile, on entrevoit la naissance d’un style singulier qui ne demande qu'a se développer. King Krule pourrait bien devenir un de ces songwriters à l’univers inspiré et intimiste comme le sont Bradford Cox et Kurt Vile. L’avenir nous en dira plus.

En bref : nouvelle coqueluche anglaise, adulé par Pitchfork et NME, King Krule semble couver un grand talent du haut de son jeune âge. Profitons-en avant qu’il ne soit happé par la hype.





Site officiel, bandcamp, site du label True Panther

"The Noose of Jah City" :



"Lead Existence" :


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08 décembre 2011

Steve Hauschildt - Tragedy & Geometry (2011)

Habituellement ultra-prolifiques, les Emeralds n’ont rien sorti cette année, du moins en trio, sûrement accaparés par le succès de leur grande œuvre de 2010, Does It Look Like I’m Here ?, et la tournée qui a suivi. Le showman et soliste du groupe, le rouquin Mark McGuire, a quand même trouvé le moyen de sortir deux albums, l’un seul (Get Lost) et l’autre avec le duo Trouble Books, ainsi qu’une double compile. Mais la surprise vient du plus discret des droneux de Cleveland, Steve Hauschildt, dont Tragedy & Geometry est le premier véritable effort solo, après une poignée de cassettes et de Cdr. En charge de la programmation des synthétiseurs, Hauschildt a sans doute énormément contribué à l’évolution des Emeralds vers un son plus électronique et hypnotisant, moins bruitiste que sur leurs livraisons passées. Ses arpèges euphoriques et ses accords flottants fournissaient un cadre parfait pour les divagations guitaristiques de son acolyte.

Il y avait une telle complémentarité entre les deux musiciens (et même les trois, n’oublions pas John Elliott) sur DILLIMH ? que je me suis naturellement demandé, en lançant la galette, si Hauschildt supporterait le poids de la solitude. Et la réponse est : oui et non. Oui parce que des titres comme "Overnight Venusian" et "Batteries May Drain" sont des petites perles psychédéliques ; le premier semblable à un océan ténébreux de nappes, le second, pour moi le meilleur du LP, dans une veine clairement krautrock à la Neu!, avec un beat mid-tempo presque dansant et un riff bien accrocheur. Et non, parce que Steve a beau se démener comme un diable sur ses claviers, ce qui fonctionne sur quelques morceaux tombe un peu à plat sur d’autres.

"Music for a Moire Pattern", la pièce centrale de l’album, présente par exemple une progression un peu trop molle du genou pour maintenir l’attention éveillée durant ses 11 minutes. Quant aux plages ambient courtes qui font office d’interlude ("Arche", "Cupid’s Dart"), elles ne présentent pas un grand intérêt. Tragedy & Geometry souffre surtout d’une trop grande uniformité de textures, et l’on se prend à imaginer à quel point certains titres pourraient être sublimés par la guitare de McGuire. "Already Replaced" apparaît ainsi comme une version squelettique, loin d’être désagréable mais incomplète, du grandiose "Candy Shoppe".

Si l’ensemble manque parfois de relief et de tension, c’est parce que Hauschildt a fait des choix esthétiques forts, en s’orientant vers des sons chauds et accueillants, et en structurant ses morceaux comme de vraies chansons pop. Tout en restant bien sûr très cosmique ("Blue Marlin", "Peroxide"…), Tragedy & Geometry ne vise pas le même type de transe que les Emeralds, reste plus en retenue, moins expansif, ce qui en fait, de loin, le disque le plus accessible de toute la galaxie Emeralds, et une formidable porte d’entrée vers l’œuvre foisonnante du groupe.

En bref : escapade solo plutôt réussie pour le plus discret des Emeralds. Moins viscéral et plus pop que les disques du trio, Tragedy & Geometry est accessible, planant, et contient quelques fulgurances, comme le fabuleux "Batteries May Drain", mais aussi quelques longueurs.




Le site de Kranky

A lire aussi : Emeralds - Does It Look Like I'm Here ? et Mark McGuire - Living With Yourself (2010)




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04 décembre 2011

True Widow - A.H.A.T.H.H.A.F.T.C.T.T.C.O.T.E. (2011)

Je sais, je tiens là le titre le plus long et le plus idiot de l'année 2011, voire au delà ! Décodage immédiat : "As High As The Highest Heavens and From The Center To The Circumferance Of The Earth". On pourra y reconnaître l'ambition tellurico-stratosphérique typique d'une certaine tendance shoegaze, à la recherche d'un son à la fois massif et ample. Mais là encore, il ne suffit pas d'appuyer sur une pédale d'effet pour avoir du talent, et n'est pas Besnard lakes qui veut. Trio originaire de New York, True Widow, se la joue puissant, sombre et minimal, et, sans être follement original, trouve un style et un son, qui ont tout pour plaire.

On ne peut pas dire que la presse spécialisée ait buzzé d'une manière ou d'une autre sur cette formation (aucune recension à ma connaissance) ; c'est donc grâce à un disquaire (et oui ça existe encore, les ptits jeunes) que j'ai découvert ce disque.

Le son accroche tout de suite l'écoute : cette batterie downtempo qui ouvre le premier morceau "Jackyll", mixée très en avant, sonne au plus près de l'oreille, et semble dire merde au Loveless de My Bloody Valentine. Puis un lent tremblement de terre, quelque chose qui vous saisit doucement, vous impacte physiquement, une basse qui semble vouloir célébrer les noces du sludge et du shoegaze. Et enfin, une guitare claire amorce un motif entêtant qui sera repris par la voix.

Tout l'album repose sur ce minimalisme instrumental basse/batterie/guitare, très loin du prog savant des Besnard Lakes. Sur des tempos généralement lents, chaque instrument a droit à son intro, son attaque. Une sorte de stoner rock shoegaze, avec des voix claires, tantôt masculine tantôt féminine, direction le plus haut des cieux, mais qui viennent habilement élargir le spectre sonore, et évitent à l'ensemble de sombrer définitivement dans la crypte.

Du coup, les compos sont d'une grande simplicité, et les paroles aussi. Les motifs mélodiques ne sont jamais très développés, esthétique stoner oblige, et la guitare assure ce qui pourrait parfois ressembler à des ponts. Tout est tellement étiré que les refrains arrivent comme des codas, en délivrant l'oreille des boucles répétitives. Bon, les amateurs de chanson seront peut-être un peu perplexes, mais " Skull eyes" prouve qu'ils savent en écrire, et qu'ils ont la possibilité pour leur prochain album de ne pas se répéter, en se contentant de leurs trouvailles sonores.

En Bref : du stoner rock pour âmes en peine, sombres héros de la crypte, exilés pour veuvage à plein temps, les yeux rivés sur les chaussures. Les voix et les bribes de mélodies apportent ce qu'il faut de délicatesse.




Le site officiel



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01 décembre 2011

Floating Points - Shadows EP (2011)

Nous avions découvert ce producteur avec son énorme Vacuum EP, en 2009. Déçus par son premier live parisien quelques mois plus tard, nous avions mis cette piètre performance sur le compte de sa jeunesse. Ceci dit, le potentiel de Sam Shepherd apparaissait déjà avec évidence, ainsi que son ouverture d’esprit et sa vision élégante du groove. Depuis, le Britannique a mûri et lâché quelques beaux 12'', dans des styles très variés, de ses travaux orientés bass music sur Planet Mu ou house sur son propre label Eglo, à ses aventures plus jazzy et instrumentales sur Ninja Tune, dans un style proche du Cinematic Orchestra. Mais il n’avait pas encore sorti le disque qu’on attendait de lui, celui qui accomplirait la synthèse entre toutes ces orientations. Eh bien le voici, ce fameux disque. Shadows est l’œuvre d’un musicien au top de sa forme, sûr de son style. Très long EP qui a tout d’un album (37 minutes pour 5 titres), il confirme Floating Points comme l’un des artistes les plus intéressants à avoir émergé de Londres ces dernières années.


Il n’est finalement que très peu question de house sur cet EP, bien qu’il s’articule autour d’un véritable chef-d’œuvre du genre, "ARP3", sorte de prolongement mélancolique de "Vacuum Boogie". Même lorsqu’un pied house vient délicatement se poser sur le piano de "Realise", c’est pour mieux être perverti, saccadé, et finir plus près de Burial que de Theo Parrish. Les rythmiques garage et 2-step, la basse synthétique et les nappes surpuissantes rappellent que Floating Points fait partie de la même génération que Julio Bashmore ou Joy Orbison. Mais les ressemblances s’arrêtent là, car le son de Floating Points n’est pas aussi exubérant et direct, taillé pour les clubs. Il est au contraire très intériorisé, concentré sur les détails et l’émotion. Autant au niveau de ses motifs mélodiques que de son ambiance et de sa structure, Shadows peut d’ailleurs être considéré comme un disque de jazz.

"Myrtle Avenue" et "Sais" sont clairement influencés par le son de Weather Report, du Miles Davis de Bitches Brew et par le côté organique des pianos électriques de Bob James et Herbie Hancock. La manière qu’a Shepherd d’imbriquer ses morceaux et de tenir une même couleur musicale sur l’ensemble du disque est également très jazzy (ou cinématographique si vous préférez) - c’est flagrant sur le diptyque "Realise" / "Obfuse". Tout n’est ici que délicatesse et sobriété, c’est pourquoi une écoute superficielle de Shadows peut laisser une fausse impression de platitude. Il faut faire l’effort de tendre l’oreille pour en apprécier toutes les subtilités.

En bref : jazzy, subtil, jouant astucieusement avec les codes de la house et de la bass music, Shadows est à ce jour le disque le plus abouti de Floating Points.





Floating Points sur Soundcloud et Twitter
Le site d’Eglo Records

A lire aussi : Floating Points – Vacuum EP (2009)



Floating Points - Sais from Will Hurt on Vimeo.




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25 novembre 2011

Curren$y - Verde Terrace (2011)

Un peu de hip-hop ne fait pas de mal. Surtout quand c’est pour mettre à l’honneur l’un des plus discrets (et pourtant prolifique) rappeurs US. Le MC de New Orleans a battu tous les records en 2011 avec deux albums (dont un avec The Alchemist) et deux mixtapes officielles. Verde Terrace est la dernière de ces dernières, produite par Dj Drama, et peut à juste titre être considérée comme un véritable album de quinze titres. Comme toujours avec Spitta (un autre de ses pseudos) le résultat est quasi impeccable.

Avec lui j’ai découvert le terme weed-rap, et plus particulièrement weed-talk. Spitta est un gros fumeur de marijuana et ne s’en cache pas, aussi bien dans le flow nonchalant que dans les textes explicites à base de jeux de mots fumeux. Verde Terrace ne change pas la donne et aligne des chill-beats en mode laid-back. On ne s’y presse pas, on est cool. "Hennessy beach" le démontre avec force d’instruments jazzy, saxophone et claviers old-school en tête.

Mais il peut aussi s’aventurer non sans risques dans un registre plus "banger", c’est-à-dire tape à l’œil. "Car talk" est en cela un gros morceau west-coast à la limite du vulgos, mais une sacré bombe si l’on se laisse aller. Mais c’est une exception. L’ensemble reste plutôt groovy et de très bonne facture pour qui aime chiller justement. Entre autres, Young Roddy vient lui prêter main forte sur l’excellent "Crack BC". Lil Wayne également sur le bien nommé "Smoke sumthin" qui reprend l’instru du "Elevators" d’Outkast. Les reste est excellent, et malgré quelques titres en-dessous, l’album s’écoute d’une traite avec grand plaisir.

En bref : un très bon disque (gratuit) pour découvrir le hip-hop laid-back de Curren$y. Imparable de manière générale.





Le site officiel

Télécharger la mixtape gratuitement

"Music to ride to" :


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24 novembre 2011

The Heads - Relaxing With The Heads (1995)

On ne trouve plus grand chose aujourd’hui sur la toile ou ailleurs au sujet du groupe anglais The Heads. C’est fort dommage car au milieu des années 90, à une époque de l’histoire de la musique où il était bon ton de se pavanaer sur la brit pop d’Oasis, c’était l’une des rares formations britannique à jouer la carte du rentre-dedans grunge et psyché. A l’occasion de la ressortie en double cd -plus de 10 ans après- de l’album jusqu’alors quasi introuvable, il était grand temps de revenir sur ce disque en particulier qui comme nombre de premiers albums montre le sommet de ce que peut faire un groupe.

Comment ne pas se sentir accablé sous le coup de massue qu’est "Quad", titre introductif de l’album. D’une cacophonie de drones, fuzz, réverbs, le morceau frappe par la basse de H.O. Morgan immédiatement suivie des guitares tonitruantes de Simon Price et surtout Paul Allen (alors tout nouveau dans le groupe, remplaçant le formateur originel). A la batterie derrière, Wayne Maskell tape dur. Un son massif que l’on a retrouvé par la suite chez les Queen Of The Stone Age ou plus récemment chez Megafauna. C’est bien évidemment l’une des bombes du disque, qui commence sur les chapeaux de roues.

Originaires de Bristol, The Heads nouvellement formés enregistrent quasiment tout en jam lo-fi ce manifeste de musique stoner au Foel Studio sous les manettes de l’un des membres d’Hawkwind. On pense à eux en effet, mais aussi à toute la bande Loop, Spacemen 3, Stooges, MC5… Les références se suivent et ne se ressemblent pas, mais les six Lp qui suivront témoigneront de ce délicieux melting-pot. Toujours dans l’excès et la non sophistication, The Heads et le chanteur Paul Allen envoient du bois. "Chipped" est un autre de ces rouleaux compresseurs.

Tous les morceaux sont du même acabit. Que ce soient les anciens, ou ceux du disque additionnel de la réédition qui comporte notamment des inédits et des extraits des trois Peel sessions réalisées (Peel était l’un de leur plus grands fans et ne s’en ai jamais caché). Et puis encore une fois parlons visuel -car le numérique n’a pas encore gagné- cette pochette façon Russ Meyer est tout de même sensationnelle !

En bref : drivé par des guitares écorchées vives et plusieurs très bons morceaux, ce premier album d’un groupe anglais disparu peut candidater au titre de chef d’œuvre de son époque, dans son genre.




Le site officiel pour le moins 1995

A lire aussi : Megafauna - Larger Than Human (2010)

"Quad" :



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Oneohtrix Point Never - Replica (2011)

Replica est le 6ème album de Daniel Lopatin sous cet imprononçable pseudo, et c’est aussi le meilleur. Si tout ce que touche le petit gars de Brooklyn ne se transforme pas forcément en or, à l’image du désagréable LP de Ford & Lopatin sorti en début d’année, il est difficile de nier que ses productions en tant qu’Oneohtrix Point Never méritent toutes les louanges qu’elles ont pu recevoir sur le net et ailleurs. Son style, qui s’affine un peu plus à chaque sortie, est on ne peut plus compliqué à définir. Les influences de Steve Reich, du drone et de la Kosmische Musik sont les plus détectables, mais cette musique hautement stupéfiante ne peut se résumer à ça. Car on y trouve également de larges traces d’ambient et d’électronica 90s, ainsi que des résidus de jazz, de house, de musiques classique et contemporaine... Dans l’unique but de nous faire triper, OPN use de tous les pouvoirs qui sont en sa possession, sans aucune considération de genre, et c’est l’un des aspects les plus appréciables de l’album.

Pas tout à fait aussi morbide que le suggère sa pochette, Replica est plus méditatif qu’apocalyptique. Le type de disque qui vous fait entrer bien profondément en vous-même, jusqu’à n’être plus qu’une sorte de conscience décharnée, un squelette métaphysique. Cela tient surtout à son caractère totalement immersif, dû pour l’essentiel à l’accumulation de boucles entêtantes de piano, de cordes intenses, de nappes et de sonorités aquatiques – cf. la bien nommée "Submersible". C’est d’ailleurs de cette capacité à envelopper que l’album tient sa cohérence, malgré un fourmillement d’idées et des morceaux aux structures souvent complexes et évolutives.

Entre l’ambiance presque grégorienne de "Remember", l’incroyable "Sleep Dealer" derrière laquelle se dressent les spectres de The Field et Moodymann, l’électronica à la Boards Of Canada, et la récréation 8 bit de "Child Soldier", Oneohtrix Point Never offre un voyage cosmique all inclusive, tâte de toutes les textures les plus opiacées, jusqu’à massacrer, par moments, ses harmonies sous le bruit blanc ou les parasites. Pour autant, l’ensemble est beaucoup moins noisy et expérimental, plus rythmique et carré que ses productions précédentes.


C’est qu’OPN a changé de méthode pour ce disque, s’appliquant à travailler quasi uniquement à partir de samples de vieilles publicités. Un concept intéressant, qui revient en gros à transformer la merde en or, tout en faisant appel à la mémoire de chacun de manière subliminale. Mais cet aspect théorique reste secondaire car les sources sont impossibles à identifier, et surtout parce que la beauté immédiate de cette musique efface toute velléité de réflexion approfondie au profit d’un état d’introspection plus passif.

Déclenchées par les sons concrets et l’hypnose des boucles, des images surgissent, toujours légèrement embuées, comme atténuées par un trajet de plusieurs années-lumière. Ce sont des visions cosmiques, des bribes d'au-delà qui glacent souvent le sang mais s'avèrent aussi étrangement réconfortantes. Une expérience de cinéma mental assez hallucinante, à réserver tout de même aux oreilles téméraires.

En bref : un exercice pointu de sampling au service d’un psychédélisme électronique à la fois éthéré et très prenant. Le port d’un scaphandre ou d’une combi d’astronaute est vivement conseillé pour s’immerger dans le cosmos d’OPN. L’un des gros trips de 2011.



Le site d’OPN
Les sites de Mexican Summer et Software Records

A lire aussi : Tim Hecker – Ravedeath, 1972 (2011) et Emeralds - Does It Look Like I’m Here ? (2011)


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22 novembre 2011

Nomenklatür - Fascinated By The Chaos (2011)

Encore une fois c’est la pochette qui m’a plongé dans l’univers du duo français Nomenklatür. Entre visuel hard-core et éclat électronique, avec ce corps dont le cerveau rayonne et où la peau est à nue. Le titre plus ou moins fascinant également. L’envie d’en savoir plus, d’écouter et de se laisser aller à un genre dont je ne suis pas forcément spécialiste, une sorte de techno new-wave sombre et marécageuse. Et dans cette optique, le deuxième Lp d’Olivier Brucker et Olivier Rossi se pose là.

Instantanément ça marche. On retrouve un son mi-analogique mi-digital, des basses pour danseurs de salon et une noirceur affirmée. C’est pourquoi il ne faut pas trop croire le premier titre de l’album, "It’s all in the air" qui fait appel à la voix éthérée et hypnotique de Mini, car on ne la retrouvera plus par la suite. Dès "Personal diary" on est un peu plus dans le vrai univers Nomenklatür. Angoissants et longs, leurs tracks le sont très certainement. On pense aux années 80’s, à Giorgio Moroder parfois ("This is going to happen"), mais de manière générale le son est pourtant très allemand.

Leur premier album Gift Of Ages (sorti chez Space Factory, quel programme !) était quant à lui plus indus, davantage new-wave. Ici c’est réellement la précision métronomique teutonne qui intervient. Surtout sur le superbe "Freaky freaky". D’une noirceur totale, Nomenklatür extrait un spleen électronique qui ne cache cependant pas une certaine évidence pop, celle-là même qui m’a certainement accroché au projet. Le break de ce dernier morceau à 3’35" en témoigne. Pas de surprise que tout cela soit sorti chez Module.

En bref : bande originale possible d’un film imaginaire, un film où le héros serait vêtu de noir et marcherait seul dans la neige, sur fond d’électronique froide et entraînante à la fois.




Le site du disque, et la page Soundcloud de Nomenklatür qui recèle plein de super mixs à se passer en soirée

L’excellent teaser de l’album en 5’52"



Le titre éponyme :



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21 novembre 2011

I’m From Barcelona - Concert à Bordeaux le 15/10/11

Un concert d’I’m From Barcelona c’est un peu plus qu’un concert, sans en être tout à fait un, je m’explique. Déjà leur réputation les a précédés. Quand on s’y déplace on sait que l’on peut y aller déguisés, grimés, enjoués, éméchés, pas de soucis. Clairement, un concert d’I’m From Barcelona c’est une grande fiesta de près de deux heures non stop. Une cours de récréation géante dans laquelle il est interdit de se prendre au sérieux, de bailler ou de s’énerver contre son voisin. C’est sourire jusqu’aux oreilles pour tout le monde.

Puis ils ont ces bouilles de suédois, touts rondes et barbues. Et puis ils sont treize sur scène, sur deux étages (ils peuvent monter jusqu’à 29). Ils se marrent, ils s’éclatent, nous aussi. Très vite, comme si cela ne suffisait pas, la bande de foldingues bombarde la salle de ballons de baudruches géants, et de dizaines de milliers de confettis rouges et blancs, on se croirait presque à un concert des Flaming Lips. Ca vole dans tous les sens, plus personne ne regarde le concert, les enfants adorent. Les cuivres sont à la fête, ça bouge les têtes ça bat des mains, on ne voit plus rien.

Ce sera comme ça jusqu’au bout, quand il n’y en a plus il y en a encore. En ce qui concerne la musique, soyons honnêtes, ça n’est pas forcément calé. Ils seraient 5, 10 ou 20 ça serait pareil. On a droit à un grand foutoir ou finalement les moulinets de bras et autres handclaps sont plus importants qu’un solo de guitare bien placé. Là n’est plus la question. Les morceaux des trois albums studios sont suffisamment efficaces pour mettre en musique des publicités de voiture, ça ira donc pour nous faire danser main dans la main. Parce que ce soir là, que l’on vienne de Jönköping, de Bordeaux ou d’ailleurs, on vient tous de Barcelona, dans la joie et la bonne humeur.

Le site du Krakatoa, celui du groupe

Un aperçu de la folle ambiance :



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14 novembre 2011

Mars Red Sky - S/t (2011)

On avait raté la sortie du 45, on ne pouvait manquer celle de l’album en vinyle (500 ex only). Mars Red Sky pour ceux qui on ne sait comment seraient passés à côté est le nouveau projet disons, stoner -appelons un chat un chat-, du meilleur songwritter français, alias Julien Pras. Alors vous me direz quel est le rapport entre un délicat confectionneur de ballades pop et un grand méchant loup à guitare électrique ? A priori aucun, et pourtant force est de constater que le disque fonctionne à plein régime, potards à 11, et comble un vide à priori bien présent dans le paysage musical hexagonal.

Mars Red Sky est un trio. Autour de Julien Pras (Calc, Victory Hall), on retrouve le batteur Led Zepelien Benoit Busser et le bassiste débordant d’énergie Jimmy Kinast. Pas plus. Et ça suffit largement pour faire revivre Black Sabbath et autres Kyuss d’un coup de baguette magique. Julien Pras quant à lui, à la manière d’un Elliott Smith avec Heatmiser, ou J. Mascis avec Dinosaur Jr. s’autorise une parenthèse bruyante bien que mélodique. C’est d’ailleurs la seule concession de ce disque à priori violent : être gorgé de mélodies, sans doute inspirées par le désert espagnol des Barderas où la musique a été mise en boîte, entre deux trips de peyotl assurément.

En fait l’album est davantage planant que massif, sans doute grâce à la voix de Julien gentiment psychédélique. Mais bon rassurez-vous ça envoie quand même du bois (les riffs lourdissimes de "Marble sky"). Entre instrumentaux assumés (un "Falls" hypnotique ou encore "Saddle point") et tubes de toujours ("Strong reflexion" et sa basse, lent et planant, mais aussi l’incontournable "Curse"), le disque défile jusqu’à son terme sans fausse note. Il faut dire 7 titres (longs) c’est peu, même si la version vinyle comporte un titre bonux. On en redemande.

En bref : nous aussi on sait faire du stoner mélodique bien lourd et perché comme du Dead Meadow.




Le site officiel

Acheter  Mars Red Sky - S/t chez l'International Records

Ma préférée, "Marble sky" :


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08 novembre 2011

Other Lives - Tamer Animals (2011)

En voilà un. Un disque de 2011 qui risque de laisser une trace et dont on se souviendra à la fin. Comme un Timber Timbre, on y revient, parce que l’on sait que l’on va y découvrir des choses à chaque fois. Et j’ai envie de dire "enfin!" pour ce duo d’Oklahoma qui avait déjà sorti un très beau premier opus (plus sombre encore) en 2009. Au final c’est un disque presque outsider qui commence à se retrouver sur beaucoup de lèvres, et qui irrémédiablement va se frayer un chemin vers un petit succès cette année.

Que font particulièrement Jesse Tabish et Jonathan Mooney comme musique ? Une sorte de folk céleste qui tient autant du western hanté que de la ballade poussiéreuse. Une majesté harmonique de chaque instant, mieux que n’importe quel Fleet Foxes. Par contre un peu de Grizzly Bear oui. Du Midlake parfois. Ce qui marque aussi c’est la grande retenue dans l’interprétation, cette majesté rampante qui sait aussi envoyer les cordes quand il faut.


Sans prévenir, Tamer Animals remplit ses 40 petites (mais suffisantes) minutes de majesté harmonique, imprégnant chaque titre d’un halo de grâce tout en créant une possible bande originale de film. Au milieu, émergentes, il y a surtout deux tours d’ivoire, deux morceaux incarnés. "For 12", chevauchée nocturne qui emprunterait presque son intro aux Suburbs canadiens avec ses cordes dénudées et son piano. L’un des plus beaux titres de l’année. L’autre c’est "Old statues". D’une intro morriconnienne le morceau dévie comme un "Black water" vers quelque chose de beaucoup plus grand et subtil, sans âge. Le reste de l’album est tout simplement tuant.

En bref : un très beau disque de folk habité et subtilement orchestré, possédé de bout en bout, avec de vrais beau titres. Belle surprise.




Le site officiel

"For 12" et "Old statues" :





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Paradis - Parfait Tirage EP (2011)

A la tête du show radio Beats In Space (diffusé en France tous les samedi soir sur Radio Campus), dont il a animé près de 600 épisodes, Tim Sweeney est une des têtes chercheuses les plus fiables de la musique électronique. Diffusant des exclus, recevant des invités plus prestigieux les uns que les autres (Andrew Weatherall, DJ Harvey, Laurent Garnier, Morgan Geist…), le DJ New Yorkais, proche du crew DFA, est devenu incontournable grâce à des sélections avisées et très éclectiques. 12 ans après sa première émission, il lance enfin son propre label et l’inaugure avec un single disponible uniquement en vinyle signé par des Parisiens totalement inconnus, Simon Mény et Pierre Rousseau, alias Paradis. Le duo, qui avait simplement envoyé sa démo à Sweeney, mixe habilement la variète pop française avec des instrus deep house élégants et veloutés. Une alliance qui pourrait paraître contre-nature sur le papier, mais qui s’avère finalement assez réussie.

Les francophones s’arrêteront sans doute sur la face B, puisqu’il s’agit d’une reprise de "La Ballade de Jim" d’Alain Souchon, tube faussement édulcoré sorti en 1985, qui vire au tragique puisque Jim finit par se suicider au volant de sa Chrysler, qui échoue "dans les fougères et les nénuphars". Pas de sample ici, Paradis réinterprète la chanson avec nonchalance sur fond de synthés rêveurs et de belles basses bien rondes. L’exercice est particulièrement casse-gueule mais le morceau s’avère finalement complètement addictif. En face A, "Parfait Tirage", également chantée en français, est quand même plus cheesy, avec ses paroles un peu mièvres évoquant des souvenirs de vacances. On pense vaguement à Daft Punk époque Discovery, à Hot Chip ou aux Junior Boys, bref à toute cette mouvance dance-pop fortement influencée par le son des années 80, bien que le beat soit plus proche des productions house / nu disco actuelles, type Wolf + Lamb. En tout cas un joli petit disque, à la lisière du kitsch, que je ne me prive pas d’écouter en boucle, sans une once de culpabilité.

En bref : aussi saugrenue que soit l’idée de revisiter Alain Souchon en version house, le duo français Paradis l’a brillamment transformée avec sa "Ballade de Jim". La face A n’est pas mal non plus dans le genre dance-pop balnéaire.



Le site de Beats In Space



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01 novembre 2011

Melvins - Glazart, Paris (31 Octobre 2011)



Je ne crois pas me tromper en disant que les Melvins n'ont jamais eu l'honneur d'être chroniqués d'une manière ou d'une autre dans DODB. Trop brutaux et pas assez mélodieux peut-être pour nos délicates oreilles. Mais pas assez virils et extrêmes pour les métalleux dignes de ce nom. Un peu rigolos même, parfois, ce qui est le péché suprême pour ces gens là. La faune du Glazart est donc assez bigarrée ce soir là : profilage indie rock, un brin punk ou gothique, quelques hétérodoxes égarés du dernier Hellfest. J'y serais bien allé d'ailleurs au Hellfest, rien que pour voir les Melvins, programmés cette année en gage d'ouverture (avec les Stooges), mais je me suis dit qu'au Glazart, au moins, je ne risquais pas de mourir dans un wall of death. Je me trompais en fait, puisque le concert fut quand même une sacrée épreuve pour la petite chose que je suis. Dans une atmosphère surchauffée, il a fallu endurer 1h30 d'attente et 1h30 de concert à fond, sans temps morts, dans une salle ultrabondée, avec pogo, slam pour garçon et filles (sympa), et arrosages en tous genres.

Ce soir c'est Halloween. Le bassiste est déguisé en fantôme et le groupe ouvre sur une impro bruitiste de fin du monde. à gauche, Buzz Osborne, réellement impressionant en géant à la coupe afro-électrifiée, magnifiée par un aérateur savamment placé. Au centre deux batteries, qui ne s'arrêtent jamais et filent le set. à droite le bassiste, au jeu plutôt subtil et diversifié, et qui n'hésite pas à doubler la voix d'Osborne. La playlist, copieuse, navigue dans la discographie. Impossible pour moi de tout reconnaître.

Les Melvins impressionent en live pour les même raisons que sur album : leur sens collectif du tempo est remarquable et se donne à voir pleinement sur scène, dans les postures, les gestes, les regards, qui font que jamais personne n'est largué. Le son est absolument nickel, on sent le groupe qui tourne et aime le live. Les deux batteries, souvent parfaitement phasées, apportent indéniablement un côté "wall of sound". C'est vrai que ça n'est pas toujours trés mélodieux, mais on est trés loin des grognements ou coassements du métal, tant la voix est expressive, la projection et le phrasé modulés. C'est d'ailleurs un spectacle en soi que de regarder Osborne chanter, bouger, animer son visage, grossir les yeux. Les Melvins nous enseignent simplement qu'expression et sentiment ne passent pas que par la mélodie. Le Coltrane de la période free ne disait-il pas que certaines émotions sont tellement intenses qu'elle ne peuvent s'exprimer au moyen de la forme et de l'harmonie ?

Pourtant "Lizzy", qui fonctionne sur le principe quiet/loud, montre que le gros Buz sait chanter avec délicatesse. Question émotion, on aura droit aux meilleurs morceaux de A senile animal : "Talking horse" et "Civilized worm". Comment parler pour les bêtes, celles que cet animal sénile qu'est l'humain assujettit et massacre, autrement que dans un fracas sonore ahurissant ? Il faut voir Osborne nous regarder dans les yeux et hurler :

"The golden talking equine god
Speaks nothing but rage
The nature of the burning bee
Means nothing to no way"

Mais il y aura aussi des morceaux plus légers (le trés funky "The kicking machine"), et même un presque pop-festif, inconnu au bataillon. On aura parcouru en 1h30 toute la gamme des rythmes, des intonations, des atmosphères. Final imprévisible, où le Buz disparaît, tel un fantôme, laissant le bassiste conclure de sa petite voix, tandis que Dale Crover lâche les baguettes pour s'exciter sur une petite boîte à effets qui ne lâchera que quelques samples de cordes pleureuses. Les Melvins sont décidemment les freaks les plus talentueux d'Halloween 2011 !

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20 octobre 2011

Nicolas Jaar - Space Is Only Noise (2011)

Échaudés par quelques EP plutôt brillants et singuliers, Nicolas Jaar nous achève avec ce LP. On sent encore aujourd'hui les fourmis dans les jambes à la première note de Time for us, EP qui, en son temps, avait rendu accroc notre ami Dave, et avait emballé notre microblogosphère. Space is only noise nous met cette fois sur le cul. Lenteur, calme et volupté, c'est l'extase tout du long. La pochette, avec son bébé endormi en bordure d'un espace quelconque, terrain très vague, nous annonce qu'on naviguera doucement dans un film d'Antonioni, dans des espaces évidés, décadrés, un peu hagard, très loin du grand speed de la machine sociale. La force de Jaar c'est d'avoir un style, et de parler sa langue tout en empruntant à la grammaire du Dubstep, du Hip Hop et de la House.

On retrouvera les ingrédients des EP, avec un côté "manifeste" en plus : ça commence et ça finit par deux types les pieds dans l'eau qui devisent sur tout et rien, on ne saisit pas vraiment de quoi ils parlent, d'ailleurs, mais on partage avec eux un moment de sérénité parfaite, ces moments où finalement on se sent exister, et où ce dont on parle n'a plus d'importance. Accéder au pur plaisir d'exister, ne rien faire, et devenir la musique.

Tout est délicat, délié et caressant dans cette musique qui apprivoise et annule tout ce qui pourrait nous heurter dans les basses fréquences et les hachures Dubstep, les beats du Hip Hop et les claps de la House. Un piano à la Éric Satie, sur fond de hoquets spatialisés nous met d'abord en condition. Puis quelques notes translucides nous introduisent dans un premier morceau très cool, très feutré, dans un genre "birth of the cool dubstep". On ne comprend rien à ce que raconte la voix bidouillée, puis tout à coup c'est Tristan Tzara en personne qui conclut l'affaire : "va mon enfant, cours mon cheval".

S'ensuit un magnifique morceau Trip hop, avec voix enfumée et break tzigane. Puis "Keep me there" déroule une house savante, où un saxophone haché et démultiplié s'invite dans la section rythmique. Le morceau nous tient en haleine, frustre et excite la danse, par son arythmie savamment entretenue. Éblouissant. Un Hip Hop anesthésié clôt la face A : "I got a". On reconnaîtra un sample de "I a got a woman", mais le grand Ray en a pris un sacré coup à la libido. Nicolas en arrive a un tel point de détachement vis à vis du monde, que l'hyper libido possessive en devient hors sujet ("i got a"... quoi déjà ?).

La face B est tout aussi passionnante. Chaque morceau s'inscrit dans un genre différent, propose une voix, un timbre différent. Une fibre pop est bien présente sur quelques morceaux ("space is only noise"), ce qui nous change un peu des bribes répétées mille fois de l'album de James Blake (aïe, je vais me faire taper sur les doigts).

En bref : un disque captivant de bout en bout, épais, poétique, stylé. Pour tous ceux qui sont proches du burn out, en ces temps difficiles.




Le site officiel

"Keep me there" :



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19 octobre 2011

Real Estate - Days (2011)

Toujours cette sensation de plénitude dans la musique de Real Estate. Insensibles aux sirènes du mainstream, Martin Courtney et ses acolytes doivent sûrement vivre sur une autre planète. À moins que les paysages du New Jersey n’aient un perpétuel effet exaltant sur leurs compositions. Car, c’est toujours dans un registre enjoué et ensoleillé que s’évertue le quatuor. Pas la moindre once de déprime ou de spleen. Ce nouvel effort semble pourtant plus produit que son prédécesseur qui donnait la délicieuse sensation d’émaner d’une vieille radio de plagiste. N’en déplaise à certains, le quatuor prouve, une fois de plus, qu’il sait faire de la bonne musique, désormais plus pop que lo-fi. Et ce, avec son apparente simplicité dénuée d’emphase.


Avec Days, leur collection de chansons pop s’agrandit de dix nouvelles compositions en mid-tempo. L’introductif "Days" et "Green Aisles" nous confirment que les guitares n’ont rien perdu de leur symbiose. Les arpèges entremêlés de solis langoureux ont un effet addictif immédiat. "It’s Real" surenchérit avec sa rythmique appuyée, sa ligne de basse véloce et ses chœurs épiques. On tient là un des singles de l'album, s'il en faut un. Nos écoutilles en redemandent. La suite n’est qu’une succession de ravissements sans interruption. "Out of tune" tire son épingle du jeu grâce à l’aisance de Matthew Mondanile qui achève le morceau sur des effusions de couleur. Et quand vient la fin, non pas de l’été mais de ce disque, Real Estate nous gratifie d’un final honorable. Pas de solos heavy ni de montée du style post-rock, juste quelques minutes épiques où la batterie et le gimmick de basse intensifient la rythmique comme un ultime jam en guise de remerciement. On apprécie.

En bref : Real Estate franchit le cap du deuxième album avec brio et continue de diffuser sa bonhomie rayonnante. De quoi transformer votre platine en toaster gorgé de soleil du New Jersey.




A lire aussi : Real Estate - S/t (2009) et le projet solo de Matthew Mondanile : Ducktails - III : Arcade Dynamics (2011)






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17 octobre 2011

Connan Mockasin - Le Poste à Galène, Marseille (15/10/11)

Arrivés tôt dans la place, Mme Nickx et moi nous retrouvons absolument seuls dans un Poste à Galène solennel, qui se remplira progressivement pour finir bondé. Dans une ambiance bon enfant, ponctuée d'un soundcheck bizarre (Mashed Potatoes, tubes disco et doo-wop revisités), le groupe arrive sur une scène déjà jonchée d'instruments, et clin d'oeil amusant, recouverte de tapis en forme de ballon de rugby et de fanions dédiés aux All Black !

L'on s'aperçoit assez vite que le show tourne autour de Connan Hosford alias Mockasin, de sa blondeur qui le fait ressembler à un Kevin Ayers contemporain (mais à la voix haut perchée) ; d'ailleurs, avant dernier à rentrer sur scène, le percussionniste, flanqué d'une guitare est aussi grimé d'une perruque blonde, qui l'espace d'un instant le fait passer pour son leader.

Du reste, tout le monde porte des perruques de fille dans la bande, et il me faudra tout le concert pour déterminer que le batteur aux faux airs de Dave Grohl, n'est pas victime de sudation naturelle, mais que celle-ci provient bien de la prothèse dégueulasse qu'il porte.

Foin de considérations capillaires, le show démarre sur de bons auspices en épousant le track-listing de l'album : c'est d'abord "Megumi the milky way above", bien envoyé par un groupe soudé et composé outre du percu discret susmentionné, d'un second guitariste également clavier en robe de chambre rose à fleur - on n'est pas au showcase de la Fnac de Lille, mais l'esprit geisha est là! Il y a aussi une très efficace section rythmique.

Connan, qui porte effectivement des mocassins rapiécés est très en verve, souhaitant un bon anniversaire à ses proches (son bassiste, l'une des tourneuses), ce qui donne un un avant goût réjouissant des festivités de la soirée. Suit l'incontournable "It's choade my dear", baignée de chorus comme du reste tous les morceaux du répertoire, qui de temps à autre sont aussi filtrés à des pédales d'effets plus tourbillonnants. Connan demande à la régie de monter le son sur sa voix, effectivement en retrait, et qui refuse les aigus sur certaines phrases de "It's choade...". Sans en faire des tonnes, l'on s'aperçoit que Connan est un guitariste inspiré dont le toucher (essentiellement balayage du pouce et picking) n'est pas sans rappeler un illustre devancier, John Mc Geosh, feu bretteur de Magazine et des meilleures oeuvres de Siouxsie and The Banshees : mêmes accords diminués, et puis ce son new-wave propre au chorus, toujours...

Alors que l'on croit Connan et ses gobelets de Coca sobre - il finit quand même par réclamer une bière - notre homme laisse lourdement tomber sa Fender au corps de Vox sur ladite bouteille. Par la suite, "Unicorn in uniform" déçoit un peu, car exempte de ce son de synthé onirique qui lui est propre, mais "Faking jazz together" envoie la sauce !

Arrivé au mitan du concert, et avant une longue jam de rigueur sur "Forever dolphin love", bien plus digeste que sur disque, Connan, pas barbare, nous prévient que pour fêter la dernière date de sa tournée française en compagnie de son formidable groupe, il y a une after prévue après le set, qu'on est bienvenus si on souhaite jerker avec la bande de kiwis....

Après le rappel, ambiance totalement débridée : pour fêter l'ambiance "lézard" décrétée par Connan, place à un sauter dans la fosse, quoi dans le public, montage à califourchon sur le dos d'un grand gaillard, grand délire de traversage du public du peignoir rose, pour le morceau du même nom "Lizard", nouveau titre dansant et très emballant, appelé à figurer dans le prochain disque. Tout comme ce "I wanna roll with you" sur lequel notre blondinet invite le public à répéter ad libitum deux phrases, le titre puis "You're such an easy thing", et pour lequel votre serviteur sera convoqué pour vocaliser au micro.

Finale avec un "Please turn me into the snat" de haute volée, avant que de guincher en compagnie d'une poignée de survivants désireux eux aussi d'en découdre sur des vieux hits de Blondie, pendant que madame Nickx se fait prendre en photo aux côtés de Connan buvant une coupe de champagne. Excellente soirée, et nous continuerons bien sûr à suivre le périple discographique de ces oiseaux avec grand intérêt.

"Egon Hosford"



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Concours - Fink en concert au Rocher de Palmer, places à gagner

L’anglais a sorti cette année son quatrième album studio intitulé Perfect Darkness et même si l’on n’a pas encore eu le temps d’en parler on peut vous dire qu’il est très bien. Toujours chez Ninja Tunes, toujours aussi minimaliste et touchant, Fink continue d’explorer avec sa guitare des territoires folk feutrés qui ne manqueront pas de ravir quiconque acceptera de s’y plonger. C’est sur la date bordelaise du sublime Rocher de Palmer que nous avons jeté notre dévolu pour vous faire gagner l’un des deux pass pour deux mis en jeu. Pour cela il suffit de répondre à la question suivante :

Quelle note avait-on mis à l’album Sort Of Revolution de Fink sorti en 2009 ?

Et d’envoyer vos réponses à contact@desoreillesdansbabylone.com avant le samedi 29 octobre. Bonne chance à tous.

Le site de Fink, celui du Rocher
Réserver sa place sur Digitick



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16 octobre 2011

Baxter Dury - Happy Soup (2011)

« No one ever told us that - haha hahaha - we're gonna be left alone - HAHAHAHA HAAAAAAAHAHA ».Ce gros fou rire gras, probablement capté en studio puis superposé sur l’un des refrains les plus gracieux de cet élégant Happy Soup ("The Sun"), figure en substance ce dont il est question dans ce troisième album de Baxter Dury. À écouter la voix, les histoires, et les détails de la production, on se rend très vite compte que la trivialité des choses en est la matière première. À partir de cette matière, le geste artistique de Dury s’exprime en deux mouvements : en sublimer la poésie autant qu'en moquer le grotesque. Et c’est ainsi qu’il s’amuse, avec une nonchalance déconcertante, à désamorcer les plus beaux moments de grâce du disque ("Leak at the disco", "Happy Soup") en leur juxtaposant tour à tour des notes de clavier espiègles ("Afternoon"), ou des coups de batterie puérils ("Trellic").

C’est avec cette même nonchalance que Dury, capable, on le sait, d’écrire les plus belles mélodies, réduit ses lignes de chant au minimum, parfois jusqu’au fameux sprechgesang désabusé qui avait participé à la réussite de "Cocaine Man" (Floorshow, 2005), l’un de ses titres les plus remarquables. Il laisse ainsi ses plus beaux refrains à l’enchanteresse voix féminine qui l’accompagne tout au long du disque. C’est là que je pense à Gainsbourg. Je pense aux années soixante aussi. Et je pense aux films de la Nouvelle Vague. C’est certainement le clip du premier single "Claire" qui m’y amène. Mais c’est aussi et surtout cette manière de sonner volontairement faux pour sonner émotionnellement juste. Là où ces cinéastes usaient de faux raccords, Dury use d’apparentes fausses notes (procédé évident sur "Afternoon", par exemple), ce afin de mieux saisir la beauté brute des choses.



Beaucoup de références franco-françaises, ici. Et pourtant… Chacun des disques de Baxter Dury fait preuve de choix esthétiques forts. Ici, qu’est-ce qui frappe d’emblée ? La forme pop ? Les touches de synthés ? Plus encore, c’est cette étrange mise en son de sa propre voix. Celle-ci, lorsqu’elle ne cède pas sa place à celle de la chanteuse, est particulièrement mise en avant dans le mixage. Comme si Dury avait voulu capter l’essence de son accent, sa britannicité. Et je repense au cinéma. À ces cinéastes anglais qui, à l’époque, avaient développé l’équivalent so bloody british de notre Nouvelle Vague. Je pense à l’excellent The Knack… and how to get it, où il s’agissait, comme ici, de répondre au trash par l’humour et la poésie.

Les comparaisons sont flatteuses, mais le bonhomme, lui, est humble. Humble au point d’enfouir ses plus belles perles au fond d’un album modestement sympathique. Qu’entend-on à la télé, dans les supermarchés, ou sur les sites web des magazines de mode ? "Trellic", "Claire" ? Et pourtant, à l’écoute du disque, ce sont les superbes "Leak at the disco", "Happy Soup" et "Trophies" qui laissent deviner le chef-d’œuvre que ce troisième album de Baxter Dury aurait pu être. Mais là n’était pas l’intention, et nous la respectons. Avec le chapeau bas, fût-il melon ou pas.

En bref : au triste, au trivial et au trash répondent l’humour, l’élégance et la poésie dans un bel album qui, n’essayant pas d’être le chef-d’œuvre qu’il pourrait être, cherche simplement et avant tout à affirmer sa condition éminemment britannique. Et cela suffit à en faire un objet d’intérêt universel.





Le site officiel

La chanson titre au sommet du disque, "Happy Soup" :


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