10 septembre 2013

Ty Segall - Sleeper (2013)

Première entrée discographique sur DODB pour notre blondinet préféré. Parfois, trop de choix tue le choix tant il est vrai que la fécondité d'un artiste empêche de l'aborder sous un angle serein.

Impossible toutefois d'ignorer ce nouvel effort de Ty Segall, appelé à ratisser large, tant chez les critiques qu'au sein d'un plus large public.
 
A moins que ce dernier ne reste sourd à un tempo qui s'est ralenti, et à un son moins .....brut (juste un peu d'électrique saturée sur "The Man Man") mais on en doute.


Ce disque - à la superbe pochette patchouli - qui est aux antipodes d'un produit marketé, on sait par avance qu'on va l'aimer : oeuvre non prévue dans un pourtant épais cahier des charges, et qui émane d'un deuil et d'une rupture ; est-il besoin d'en rajouter ?
 
Car reviennent en mémoire les magnifiques The Boatman's Call de Nick Cave et Sea Change de Beck, jadis minimisés car jugés neurasthéniques et peu sexy par des plumitifs aux oreilles pleines de cerumen, ces oeuvres atypiques et "difficiles", nées d'un chagrin amoureux ; bref les mêmes qui hurlaient au génie reconnu de tous de Nick Drake ne reconnaissaient pas aux artistes susnommés le droit d'enregistrer sur l'os et "on the spur of the moment" des disques certes plus exigeants mais à l'évidente beauté.

Chouette, la genèse du 7ème effort sous le nom de Ty Segall (chiffre qui compte double au regard des collaborations en binôme et au sein de groupes) procède d'un même trauma. Petit rappel, au soir d'une tournée française printanière et amoureusement relatée dans ces colonnes , Ty Segall doit repartir fissa aux Etats-Unis  pour les obsèques de son père. En résulte une sordide histoire de haine familiale. dont l'artiste n'aura de cesse de coucher sur papier les tourments : pour conjurer la perte, pour réhabiliter le père et surtout régler son compte à une mère honnie.

Et voici 10 nouvelles chansons assénées avec rage, mais (et quand bien même...) nullement larmoyantes dans leurs apprêts : de la folk, de la folk et encore de la folk nimbée de pop (ouiiiiiii!), et on a envie de poser une question : mais comment fait-il ? Oui comment fait Ty Segall pour avec quasi les mêmes ingrédients (une guitare pourrie) et une production certes moins rudimentaire qu'hier mais toujours foncièrement lo-fi (un peu de violon ci et là), se renouveler de la sorte, tant il est vrai que ses chansons, ses albums se distinguent clairement les uns des autres.

On parle d'un mec qui depuis que Beck (l'évidente figure tutélaire d'un folk lo-fi racé) s'est mis en sommeil en 2008 (hors publications Internet) enregistre bon an mal an deux disques minimum, avec toujours autant de bonheur, car il n'existe pas à proprement parler (tout comme longtemps pour son ainé) de mauvais disque de Ty Segall. L'auditeur préfèrera indifféremment le garage inondé d'écho de Lemons (2009), la pop plus chatoyante bien que crade de Melted (2010), l'ouverture plus grand public de Twins  (2012) ou celle punk bruitiste et sans concession de Slaughterhouse (2012), et ainsi de suite jusqu'aux associations destroy avec White Fence ou Mikal Cronin.

Partout la même quête de la mélodie forte de chansons pour la plupart simples à fredonner sous la douche, malgré ces lyrics vengeurs - faut voir ce que maman Segall se prend dans la tronche dans "She don't care"! Lu récemment sur un forum l'angoissante question suivante : pourquoi s'intéresser désormais plus à Ty Segall qu'aux Black Keys ? Sans doute parce que là où les uns ont mis du clinquant dans leur son tout en composant encore et toujours la même chanson (mais n'est pas Ramones qui veut), notre prolifique compositeur n'en finit pas de composer de tuantes suites d'accords, tout en faisant mine de vaguement mieux produire ses disques.

Alors s'il est vrai qu'un écrin sonore n'est pas la panacée à une réussite artistique, on se demande ce que ça sera lorsque notre homme aura des velléités de production façon Burt Bacharach, Shadow Morton ou Phil Spector.

En bref :  Ty Segall en veut à mort à sa maman et avec une simple acoustique  livre sa catharsis. Sans éluder le pathos, mais avec beaucoup de retenue et de savoir-faire mélodique. Comme d'hab quoi.





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"Sleeper" :


"She don't care" :


 

2 Comments:

Ju said...

Finalement un peu déçu par ce disque, que je trouve beaucoup trop court, et presque un peu pauvre en mélodie. J'adore le début pourtant, mais sur la fin il me perd.
D'ailleurs tu n'as pas mi 5 étoiles..
Mais bon remercions Ty d'exister !
Bises

Nickx said...

Tu veux savoir pour la demi étoile manquante ?
En fait, j'ai réutilisé un vieux brouillon inusité dans lequel figuraient les 4 étoiles et demie.
Par facilité, je l'ai utilisé.
Sinon à mes yeux il valait les 5.

C'est clair que Ty, cela reste très basique, pas encore de mélodies à tiroir ou de truc supra compliqué, mais dans le genre comptine efficace qui te rentre dans le cortex, il n'a pas d'équivalent.
Et cet album me plait davantage que le précédent (Twins) car il est plus cohérent dans son ensemble.

Ah, et réécoute The West qui termine l'album, superbe !

Bises aussi