19 novembre 2013

Tropic Of Cancer - Restless Idylls (2013)


Le tropique du Cancer est une latitude sous laquelle il est possible d'observer directement, lors du solstice d'été, le soleil à son zénith. N'en déplaise à la californienne Camella Lobo, initiatrice de ce Restless Idylls, qui semble engloutir toute la lumière du monde dans une faille terrestre abyssale.

Signé sur le label répondant au titre assez significatif "Blackest Ever Black", Restless Idylls revêt une texture synthétique et glaciale. Le son initié par ce duo féminin éloigne l'auditeur un peu plus de l'astre solaire à mesure qu'il engloutit l'espace, aidé par un synthétiseur crachant des nappes électroniques massives et crépusculaires.

D'une beauté vénéneuse, les textures sonores employées sur ce disque jouissent d'une instrumentalisation millimétrique déclinant une palette de styles alliant shoegaze, coldwave et post-punk expérimental. La caisse de batterie qui gicle sur "Court Of Devotion", la guitare filamentaire de "Children Of A Lesser God" ou encore la basse limbesque de "The Season Won't Change You (And Neither Will You)", font valoir une sonorité sèche et appuyée, qui contrebalance avec des couches électriques lancinantes comme des volutes de fumée.



Sur le plan vocal, Camella Bono incante plus qu'elle ne chante, corroborant une réverb sonore qui bien qu'amoindrissant l'intelligibilité de son propos, renforce l'emprunte mystique de son timbre.

En résulte une esthétique ésotérique proche d'un rituel païen, dans lequel les mots et les gestes sont dépositaires du sacré. D'un écho similaire à Geoff Barrow (Beak), la voix de la stoïque américaine est d'une évanescence spectrale, telle une lumière blafarde qui tente de percer la nuée céleste. Sur une onde monocorde, elle livre ainsi son psaume aux âmes profanes que nous sommes, qui récité dans une intonation sorcellaire, tente de nous faire communiquer avec un monde indicible. L'opération saura retenir les plus animistes d'entre nous "Wake The Night", "Rites Of The Wind", les autres se voueront clairement à un autre saint devant cette ode magique à l'empreinte torturée et ténébreuse.

Restless Idylls est un disque d'ambiance d'une température hautement septentrionale, dépositaire d'une musique gothique et sépulcrale. Telle une prière, c'est dans la répétition que son principe devient clair, et çà, la prêtresse Camella Lobo semble l'avoir bien compris. Rythmes droniques et sempiternels à la clé, sa musique ne frappe pas directement à l'oreille mais insidieusement. Un modus opérandi qui contribue à faire de ce disque, une nébuleuse enclavée dans l'espace le plus désolé, où seule une contemplation minutieuse révèlera la myriade d'astres qui la compose.

En Bref : Tropic Of Cancer signe un premier album d'une noirceur univoque. S'appuyant sur l'amertume d'un post punk désenchanté, Restless Idylls vide le vivant de son substrat, pour atteindre et étreindre une obscurité salutaire. Aussi sombre qu'un ressentiment de Beth Gibbons, avis aux amateurs...






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Bandcamp Tropic Of Cancer

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