Il semblerait qu'il soit dorénavant plus aisé pour l'auditeur lambda blasé qui fait sien l'adage que trop de disques produits et écoutés tue le disque, de trouver son compte avec les songwriters oeuvrant solo. Plutôt qu'avec cette masse de groupes informes, interchangeables entre tous, dont les personnalités, les vraies avec un pédigrée, sont désespérément absentes. Alors qui est ce Kurt Vile que la critique s'est appropriée, louant et c'est mérité son 5ème LP, quand l'excellent Smoke Rings for My Halo avait déjà fait son petit effet en 2011 ? Un gaillard dégingandé de Philadelphie qui n'a pas besoin lui de casque intégral pour sortir tranquillement faire ses courses, caché qu'il est derrière une abondante tignasse .
Une sorte de fils putatif de Lou Reed récemment disparu, et de Hope Sandoval, l'enivrante meneuse des Mazzy Star, auxquels il emprunte le phrasé nonchalant du premier (davantage axé sur le talk-over) et les inflexions rêveuses et éthérées de la seconde.
Des histoires, des chroniques toutes simples d'un zicos aguerri - déjà un long passé de groupes derrière lui - qui se contente de composer chanter et jouer pour les terriens, animé d'un hédonisme bon crin et tout heureux de narrer et relater les choses de la vie toute simple à sa chère et tendre et les deux fillettes qui sont le centre de son existence. On espère donc que son désamour du sacerdoce rock'n'rollien on the road n'entamera pas l'envie d'en découdre de Kurt envers les différents publics de la planète et qu'il ne sera pas frappé du syndrome Manset/Hardy/Drake/Partridge (la liste est longue) qui ont un jour décidé de ne plus donner de nouvelles que par disques interposés. Mais il semblerait que notre homme à une époque où l'industrie du disque se meurt, privilégie encore et toujours le soutien financier de sa petite famille alors...
Car ce serait se priver d'interprétations sur le vif de ces superbes odyssées guitaristiques que sont les longues (plus c'est long... et sur ce disque, Kurt Vile a lâché la bride) et superbes "Wakin on a Pretty Day", "Was All Talk", "Girl Called Alex" (rien que pour ces trois titres...), "Too Hard", ou " Goldtone" que souligne parfois un synthé discret façon road-movie Lynchien ou Jamurshien. Sans oublier ce phasing délicat qui enlumine littéralement les chansons et notamment ce "Snowflakes are Dancing" étonnamment pudique.
Au passage, la dernière ode à une Alex se trouvait sur Father Son Spirit de Girls et cela évoque forcément de très beaux moments musicaux
Et donc se priver d'un nouveau et digne émule de Neil Young, auquel notre homme à l'instar de son compatriote en vogue Jonathan Wilson ne cache pas son attachement - voir au delà des riches morceaux évoqués, les sortes de boogie crétins que sont "KV Crimes" et son inénarrable clip "royaliste avec porteurs" ou bien "Shame Chamber", où l'ombre des chevauchées du Cheval Fou n'est jamais loin/
L'univers de cet artiste a priori sans trop d'équivalent en dépit du style chevelu-yankee-guitare-au-vent qui fait florès, laissera peut-être de marbre ceux qui arguent de la longueur excessive de certaines chansons (effectivement) ; il ravira les autres pour qui le timbre de grand échalas fatigué de Vile, associé à des sons de guitare amples et riches, est un pur enchantement.
En bref : pour qui aime la guitare, les tourneries qui s'insinuent dans le cortex de façon durable, ce disque est un régal, et plus encore semble révéler l'univers doux rêveur d'un musicien majeur.. et accessoirement réhabiliter les morceaux de 9' et les albums d'une heure.
le site officiel
"Was All Talk"
"Girl Called Alex" :
6 Comments:
Moui bien sûr, le parti folk tout ça !
Mais sinon, pas grand chose à commun vocalement et au niveau du son.
Pour ce qui est de Beck, je crains le pire pour ce qui est des deux titres en écoute sur son site.
Après, tout est affaire de coup de coeur, c'est clair : Jonathan Wilson m'en a tiré une sans remuer l'autre, tandis que le Kurt me bouleverse, j'écoute en boucle !
Genre, on s'en fout c'est plus le propos, mais je ne comprends pas qu'un disque pareil n'ait pas été nominé une seule fois dans aucun de nos palmarès.
En ce qui me concerne, je l'avoue c'est l'ignorance, depuis je me rattrape !
Rien à voir, mais je me suis laissé dire que tu allais frayer avec le rock psychédélique anglais prochainement chez la perfide Albion ?
Content de voir ce disque loué à sa juste valeur sur ce site, même avec un an de retard, c'est toujours ça!
Mon disque préféré de l'année dernière, du rock facile et gracile, purement américain dans l’âme, avec un peu de l'ADN de Neil Young.
Contre les vents j'ai rencontré Jack et Paul, ils ont pas l'air de kiffer Temples non plus :)
Je te raconterais bien çà via un mail mais je n'ai pas ton adresse.
Cet album est effectivement superbe et Neil Young n'est pas très loin.
J'ai découvert, une fois n'est pas coutume, cet album avant que cette critique ne paraisse et je me réjouis également de lire ces lignes.
Je fais partie de ceux qui encensent Jonathan Wilson, preuve que l'on peut les aimer tous deux.
LA grande claque de ce début d'année est pour moi l'album incroyable de beauté brute de Sun Kil Moon.
J'espère lire bientôt vos avis ici.
Je suis impatient de te lire. Je suppose que tu as écouté l'album qui est en ligne.
Ils sont sympas hein nos rosbeefs, par contre très limités en français :)
Feel free !
nicolas.bouquet@wanadoo.fr
@Anonyme
Tu as enièrement raison.
Moi j'ai toujours tendance à rater un grand disque malgré tout le budget et le temps d'écoute que je peux consacrer à ça.
Ce qui quelque part fausse toujours quelque peu nos référendums, manque de recul....
Je précise que le Kurt Vile n'est "que" l' "autre" grand disque de l'année en ce qui me concerne.
Je n'ai toujours pas descendu le My Bloody Valentine de son piédestal, mais ce Kurt Vile mon dieu quel pied.....d'ailleurs je m'en vais le réécouter !
Post a Comment