Il y aura toujours des auditeurs sots - certains sont malheureusement critiques - pour refuser une démarche artistique, une orientation musicale, dès lors qu'elle ne correspond pas à leurs canons. (Dieu merci, la toujours pertinente Isabelle Chelley n'est pas de ceux là.)
Beaucoup associent ainsi Nick Cave exclusivement à ses toxiques ruades rock and roll, le cantonnant paresseusement à ce blues gospel déstructuré, frénétique et dérangé dont on peut trouver les meilleurs moments dans Tender Prey, Let Love In et Abattoir Blues notamment.
Un compositeur-parolier-interprète aussi accompli et majeur que Cave ne saurait cependant être réduit à une imagerie destroy, aussi futée soit-elle. Car ce serait alors tout simplement passer à côté d'oeuvres essentielles telles que The Good Son ou The Boatman's Call, pour ne citer que les exemples les plus marquants. Va-ton ainsi écouter Berlin ou Rock Bottom ou The End... la fleur au fusil ? Est-ce le but d'une oeuvre artistique ? Pas que nous sachions....
Voici le 16ème disque de Nick Cave accompagné de ses souverains Bad Seeds. L'un des plus courts (39') et de ceux qui se méritent le plus. Bien que fini d'écrire en partie avant LE drame que tout le monde connaît, il véhicule constamment de la noirceur. Confirmée par une monochromie plus entrevue chez l'artiste depuis le lointain The Firstborn Is Dead, il est ici question de deuil (celui du fils bien sûr), et moins de rédemption ou de culpabilité qu'à l'accoutumée.
Enregistré une nouvelle fois (en partie) en France, aux studios de La Frette dans le Val d'Oise, au cours d'un processus de création postérieur ET antérieur à l'événement tragique, Skeleton Tree voit Nick Cave renouer avec l'ascèse, l'épure de certains de ses meilleurs albums mentionnés. Débarrassé des dogmes dramaturgiques gothiques et bibliques dans lesquels certains l'idéalisent, l'artiste dresse les contours funèbres de cet album par la seule puissance de ses mots, oserons-nous dire de sa poésie (magnifiques "Rings of Saturn" et "Girl in amber"),
Le "Jesus Alone" d'ouverture avec ses boucles obsédantes, est appelé à devenir un nouveau classique de l'australien avec ses mots en mantra qui le signent. D'une manière générale, il semble qu'à nouveau (comme c'était déjà le cas sur l'admirable The Boatman's Call) les Bad Seeds soient réduits à leur portion congrue - on note néanmoins avec beaucoup de surprise et de satisfaction le retour du légendaire Barry Adamson, Bad Seed ayant déserté de longue date. Mais tout ou beaucoup semble concentré autour de Warren Ellis, devenu au fil des années l'alter ego musical de Cave
Ainsi ce sont ces synthés glaciaux limite Lynchiens, ces frémissements de charley, de magnifiques choeurs en contrepoint qui sont conviés sur ce disque ; une soprano servant même un écho bienveillant sur le troublant "Distant sky". D'autres chansons, extraordinaires et comptant aisément parmi ce que Nick Cave a produit de plus remarquable, sont égrenées ("Jesus Alone", "Rings of Saturn" à nouveau), mais aussi l'incroyablement déchirant "I need you", dont nous ne ferons pas l'affront de narrer l'écho. Le dépouillement de sa beauté désolée renvoie aux terres arides et liturgiques jadis présentés par la grande Nico sur sa trilogie d'Island.
Le finale qui donne son titre à l'album, loin de capitaliser sur un mood pathos ouvre a contrario de nouvelles perspectives à l'homme et à l'artiste. D'une sereine désespérance.
En bref : loin de la parenthèse mortifère que l'on a bien voulu décrire, un nouvel album essentiel dans l'oeuvre riche de Nick Cave.
Enregistré une nouvelle fois (en partie) en France, aux studios de La Frette dans le Val d'Oise, au cours d'un processus de création postérieur ET antérieur à l'événement tragique, Skeleton Tree voit Nick Cave renouer avec l'ascèse, l'épure de certains de ses meilleurs albums mentionnés. Débarrassé des dogmes dramaturgiques gothiques et bibliques dans lesquels certains l'idéalisent, l'artiste dresse les contours funèbres de cet album par la seule puissance de ses mots, oserons-nous dire de sa poésie (magnifiques "Rings of Saturn" et "Girl in amber"),
Le "Jesus Alone" d'ouverture avec ses boucles obsédantes, est appelé à devenir un nouveau classique de l'australien avec ses mots en mantra qui le signent. D'une manière générale, il semble qu'à nouveau (comme c'était déjà le cas sur l'admirable The Boatman's Call) les Bad Seeds soient réduits à leur portion congrue - on note néanmoins avec beaucoup de surprise et de satisfaction le retour du légendaire Barry Adamson, Bad Seed ayant déserté de longue date. Mais tout ou beaucoup semble concentré autour de Warren Ellis, devenu au fil des années l'alter ego musical de Cave
Ainsi ce sont ces synthés glaciaux limite Lynchiens, ces frémissements de charley, de magnifiques choeurs en contrepoint qui sont conviés sur ce disque ; une soprano servant même un écho bienveillant sur le troublant "Distant sky". D'autres chansons, extraordinaires et comptant aisément parmi ce que Nick Cave a produit de plus remarquable, sont égrenées ("Jesus Alone", "Rings of Saturn" à nouveau), mais aussi l'incroyablement déchirant "I need you", dont nous ne ferons pas l'affront de narrer l'écho. Le dépouillement de sa beauté désolée renvoie aux terres arides et liturgiques jadis présentés par la grande Nico sur sa trilogie d'Island.
Le finale qui donne son titre à l'album, loin de capitaliser sur un mood pathos ouvre a contrario de nouvelles perspectives à l'homme et à l'artiste. D'une sereine désespérance.
En bref : loin de la parenthèse mortifère que l'on a bien voulu décrire, un nouvel album essentiel dans l'oeuvre riche de Nick Cave.
Le site de l'Artiste
"Rings of Saturn"
"I need you"
5 Comments:
Ecouté une fois pour l'instant, et même si je lui reconnais d'indéniables qualités musicales, et même sans vraiment avoir suivi le drame, je l'ai trouvé trés trés plombant. Du genre que je ne vois pas vraiment le moment de ma journée ou je pourrais me dire ''tiens je vais m'écouter Skeleton Tree''.. mais il faut sans doute que j'y revienne..
Merci pour la chronique en tous cas.
Bises
Ju
Effectivement Ju, voici le genre d'album que l'on peut difficilement mettre en fond sans y être préparé.......et qui mérite plusieurs écoutes, avant d'être apprécié à sa juste valeur.
Tu verras, il est stupéfiant !
c'est drôle, jusqu'à présent j'aimais bien nick cave, sans être fan ultra comme toi, mais là j'accroche pas du tout sur les deux morceaux envoyés
le parti pris du minimalisme musical/chant à la limite talk over me semble en être la cause. bon zut alors
bises
j'ai relu le début de ta chronique et je crois que je suis un peu concerné !
en fait, je crois que je préfère the birthday party, qui écrabouille pour moi les cramps et jesus lizard, comme sur prayers on fire. Cette musique me touche plus que la suite avec les bad seeds ! c'est plus vivant et imprévisible, vocalement c'est hallucinant, c'est le rock méchant parfait pour moi.
Ah non, pas d'accord ; The Jesus Lizard écrabouille The Birthday Party :)
Et qui d'autre pouvait te faire pipi dessus en concert comme David Yow ?
Moi, j'ai toujours préféré Cave quand il croone, quand il est calme, même si je ne crache évidemment pas sur ses ruades punk période Tender Prey.
J'ai en revanche toujours eu plus de mal avec le côté noisy chaotique de BP.
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