Saluons ici la merveilleuse idée de Ash (pour Antarctica Starts Here, hommage à John Cale ?) - sous branche de l'excellent label de réédition Superior Viaduct - de rééditer ce monument de folk psychédélique anglais. Album total dont on ne sort pas indemne, Pass The Distance est un modèle du genre, un disque légendaire dont les rares originaux sont depuis longtemps introuvables. Pourtant les rares personnes qui l'ont entendu ne s'en remettent toujours pas. J'en fais partie. Difficile de trouver mieux pour représenter "ma came".
L'Anglais Simon Finn n'a que 19 ans lorsqu'il envisage d'enregistrer son premier album solo constitué d'une petite dizaine de compositions. Ne sachant trop comment s'y prendre, il se rapproche du producteur Vic Keary qui possède le Chalk Farm Studio pour l'instant coupable de quelques titres de reggae passables seulement. Vic lui conseille de s'entourer d'un groupe, Simon n'a rien contre. On lui présente alors le guitariste David Toop et le percussionniste Paul Burwell avec qui il ne fera qu'une seule jam et un seul concert en pub avant de rentrer en studio.
Le disque sort en avril 1971 mais à cause de sa pochette parodique d'une marque de céréales pour enfants, il sera retiré de la vente après avoir perdu son procès. Bien évidemment c'est un échec, et l'album - et Simon Finn au passage - tombe dans l'oubli pendant plus de 35 ans. On entend dire que le chanteur et guitariste maudit aurait traversé l'océan pour devenir professeur de karaté et fermier au Canada.
Mais c'était sans compter sur une poignée de mélomanes ayant réussi à tomber sur l'un des rares exemplaires originaux. David Tibet du groupe expérimental Current 93 est celui qui accrochera le plus et qui réédite l'album en CD pour la première fois en 2004, permettant de le faire découvrir à un plus grand nombre encore. Ca sent l'histoire à la Rodriguez tout ça.
Mais que trouve t-on réellement sur ce disque ? A titre de comparaison on nage en plein Syd Barrett ou Alexander Skip Spence, à savoir un folk on ne peut plus acide, sombre et vulnérable. Sur les thèmes (obsessions?) du christianisme, de l'apocalypse ou de la rédemption, le jeune Simon Finn (ancien SDF pour l'anecdote) livre un testament cauchemardesque sans égal. A vrai dire il n'y a rien à jeter sur ces 39 minutes de folk disloqué.
Mais comment parler de ce disque sans un paragraphe sur LA chanson de l'album, pour certains l'une des plus grande chansons de tous les temps (rien que ça), j'ai nommé "Jerusalem", pièce centrale de 6'45" et tunnel cathartique d'une intensité à donner des frissons, ou des larmes pour certains. Simon y raconte (y gueule surtout) la traversée de la ville sainte par le Christ en route vers sa crucifixion. Il y compare l'hypocrisie des Chrétiens se retournant contre lui avec la façon dont ont été traités les idéaux de la contre culture des années 60. La recette est simple : C / Em / Am, une montée de guitare sèche et d'orgue pour accompagner une fureur vocale effrayante, qu'on adore ou qu'on déteste, sachant que Simon a tendance à systématiquement chanter faux (à la manière de Neutral Milk Hotel). Le producteur Vic Keary ajoute quant à lui moult effets stéréo, beaucoup d'échos et un max de phazing. Autre anecdote et non des moindres, Finn a composé et chanté cette chanson d'une traite et en boucle, en plein trip de mescaline, et c'est l'un de ses colocataires qui s'est finalement décidé à noter les paroles à sa place. Enfin, la montée et la fureur de la voix ont tendance à me rappeler (à moindre mesure) à Lift To Experience et leur album The Texas-Jerusalem Crossroads (coïncidence ? Je ne crois pas).
En bref : holy grail de l'acid folk anglais des 70's, Pass The Distance reste et restera un sommet de composition sans égal sur l'aliénation et la solitude.
L'album entier :
L'album entier :
Ou directement "Jerusalem" dans ta face :
Ou plus facile d'accès, "What A Day" :
1 Comment:
Ou l'on reconnaît l'influence de Simon Finn. Ainsi on pense notamment à "The big picture" sur le classique Lifted Or The Story Is In The Soil....de Bright Eyes.
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