On les avait laissés en 2020 sur un somptueux RSD single qui avait le bon goût de reprendre un incunable des Kinks ("Strange effect"). Ceci faisait suite à leur superbe sophomore (Heartbreak) enchaîné à un debut déjà très prometteur (Guilty Of Love).
Dès le début de l'année 2022, l'on savait que le couple Jade Vincent / Keefus Ciancia et leur acolyte David Holmes fomentaient pour la rentrée un nouveau disque et que bigre... l'objet était double et rose.
En préambule du projet on ne fut pas surpris durant l'été de voir égrener des maxis comme s'il en pleuvait : "Mother's been a bad girl", "Number in my phone", "Ever", "Thinkin' about her", "Turn of the screw". Tous ces titres se retrouvent bien-sûr sur le nouvel effort très girlie de Unloved qui une nouvelle fois tient toutes ses promesses.
On pouvait craindre pourtant quelques écueils eu égard à la longueur de ce Pink Album, ses plus de 80 minutes, les multiples intervenants extérieurs. Or ceux-ci savent se faire discrets : on retrouve Etienne Daho fan inconditionnel légèrement plus en avant que sur le "Remember" de l'album précédent. Car il susurre des mots doux en français sur le trépidant ''Love expérimental". Jarvis Cocker (mais l'identifierez-vous ?) n'est pas en reste sur le très apaisé ''Accountable'' ainsi que Raven Violet qui n'est autre que la fille du couple malouin sur un "Turn of the screw'' incantatoire. Et si l'auditeur prête bien l'oreille, il reconnaîtra les cris de prédicateur d'un certain Jon Spencer sur ''Call me when you have a clue'', parée d'une menaçante guitare saturée.
Toujours ce même feedback en forme de liquide amniotique (avec un chouïa de boucan supplémentaire) qui donne à l'oeuvre d'Unloved ce son irréel et unique : ces stridences de rêve, ces claviers en nappes qui tantôt lâchent les chevaux façon un Suicide énervé ("Foolin'') tantôt la jouent élégiaques comme pour du Arcade Fire première période. Ainsi sur le presque introductif ''Waiting for tomorrow'', les pistes de voix en avalanche de Jade donnent le vertige. Sur certains titres, la patronnesse de la série US Killing Eve va même jusqu'à évoquer le chant sépulcral de Siouxsie Sioux.
Et sur le très beau ''There's no way'' l'envergure cinématographique de cette musique ne déparerait pas le meilleur score de Francis Lai (cf La Leçon Particulière) que Vincent, Ciancia et Holmes ont dû beaucoup écouter.
Même sur la durée éreintante d'un (véritable) double album ; on a beau dire, on a beau faire, peu de groupes du nouveau millénaire se seront trouvés un son aussi personnel et excitant qu' Unloved.
En bref : le troisième témoignage amniotique du trio mal-aimé, marotte d'Etienne Daho que l'on sait invariablement bien inspiré. A nouveau un coup de maître.
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