2023 est l'année des sigles. Après CVC, voici RVG pour Romy Vager Group. Pas grand chose à voir pour ce qui est de l'humeur accorte, un peu l'opposé même. Romy native d'Adelaïde dont elle a fui l'esprit étriqué, en est déjà à son 3ème album sous cette bannière. Et a trouvé ses compagnons de jeu à Melbourne.
Obsédée par le rock anglais et la new-wave des années 80 (The Cure, The Smiths et Echo and The Bunnymen comptent parmi ses groupes préférés), Romy développe assez tôt des textes que l'on peut trouver très auto-centrés tant il est question du I /me/ my.
Après deux albums intrigants mais presque anodins en comparaison, RVG franchit un cap avec ce Brain Worms dont l'intitulé fait référence aux ravages d'Internet, la désinformation qui en découle auprès d'esprits trop candides. Auxquels font écho outre le morceau titre, le rageur et plus générique "Nothing really changes". Il y a bien-sûr cette sensation de voyeurisme à l'écoute de ces textes où la psyché de Romy est à nu et se livre douloureusement et ce dès le "Common ground" d'ouverture. Le son est celui du post-punk évoqué plus haut. Les guitares sont fiévreuses, comme ce chant habité de Romy à la troublante tessiture, qui évoque celui d'un Mike Scott (Waterboys), à la fois mâle mais avec l'ambiguïté transgenre de Romy. Et qui par exemple n'était pas affirmée de la sorte sur A Quality of Mercy (2017) et Feral (2020). Et c'est peu dire que ce timbre si particulier concourt pour beaucoup à l'attraction qu'exerce le disque. On n'est pas non plus loin de l'exaltation de la jeune Patti Smith non plus.
Rupture amoureuse ou sociétale ("Common ground", "Midnight sun"), deuil par écran interposé ("Tambourine"), confinement lié au COVID (presque tout le reste des textes) - celui australien a duré plus de 200 jours - sont la matrice des textes acérés de Romy Vager. Le texte invraisemblable de "Squid" où l'artiste se rêve en calmar géant et révélateur du talent de RVG ainsi que l'humour à froid de "Giant snake" qui évoque un tristement célèbre tueur en série dévisageant Romy d'un air narquois (allégorie de la ville-mère d'Adélaïde fuie pour incompatibilité artistique ?) sont à cet égard édifiants.
Romy Vager semble jouer avec ce disque une partie colossale de son futur. Psychique dans un premier temps et artistique aussi puisque le son longuement mûri et le répertoire en forme de catharsis sont une sorte d'envol définitif pour la carrière de RVG.
En bref : l'oeuvre tourmentée et à vif d'une artiste transgenre qui sait émouvoir, rudoyer et interpeller. La découverte indé de 2023.
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