Celle-là, on ne l'a pas vu venir. Un peu comme son compatriote Jim en 2023, Daisy Rickman a publié au cours du printemps un album enchanteur. Qui est cette jeune femme sévissant dans l'anonymat le plus total et publiant à compte d'auteur son deuxième album après un coup d'essai intitulé Donsya A,n Loryow ("Dance to the moons" NDA) et passé complètement sous les radars ?
Une multi-artiste que l'on peut dépeindre comme pastorale, hippie autodidacte, peignant ses propres pochettes et versée dans l'ésotérisme le plus radical. Qui affole déjà la hype et ses compteurs ; ses deux disques déjà réédités après des tirages confidentiels à 300 exemplaires, s'échangeant à prix d'or sur le Net.
Daisy Rickman vient de Mousehole dans les Cornouailles, vit encore chez ses parents et après des débuts que l'on devine communautaires au sein des folkeux Broadside Hacks (?), décide d'embrasser seule une carrière solo, placée sous le signe de l'isolement post-pandémique et des éléments dont son plus emblématique : le Soleil. Qui ici n'a rien d'une étoile noire en fin de vie puisqu'il irradie sur pas moins de la moitié des titres qui l'invoquent - "howl" en cornouaillais dans le texte désigne en effet le soleil. Nous nous trouvons ici face à un album qui au-delà de l'oecuménique scène folk de la terre de Daisy Rickman, n'est pas sans évoquer les obsessions culturelles et mythologiques d'une PJ Harvey dédiant un album entier (I Inside The Old Year Dying en 2023) aux cultures du Dorset dans leur dialecte local. A écouter en lisant Signé Olrik, la concomitante aventure de Blake &Mortimer donc.
Eprise de folk anglaise historique, il ne fut pas étonnant de voir Daisy Rickman frayer aux côtés du mythique guitariste de Suede Bernard Butler, pour un tribute à la gloire de Bert Jansch. Comment en effet ne pas imaginer la jeune femme toute de robes immaculées et de toges vêtue ne pas vouer un culte à la riche scène du début des années 70, celle des essentiels Fairport Convention , Steeleye Span, Pentangle ou autres Curved Air.
Toutes les chansons de Howl sont comme des mantras ; "Howl" le morceau-titre consistant par exemple en une boucle de sitar : guitares en bourdons accordées très bas - la figure tutélaire de Nick Drake est évidemment également omniprésente ("Bleujen an howl", "Omlesa", "Howlsedhesow") - on pense à Nico un peu ("Falling through the rising sun", à Karen Dalton, à Vashti Bunyan (sans le côté bêlant) ; mais à la vérité le timbre grave de Daisy et son style s'apparentent davantage à ceux de Sibylle Baier, géniale chanteuse culte d'ascendance allemande découverte à l'orée des années 2000.
Oeuvre sans label, Howl donne à entendre de la guitare 12 cordes, du sitar, du violon, de l'accordéon, de la contrebasse, du banjo, du bouzouki, de la clarinette, du violoncelle, des synthés et même de la batterie sur un titre (l'hypnotique "Winter solstice") ; tous ces instruments sont exécutées par un elfe des Cornouailles.
En véritable concurrente de Sun Ra sur son thème de prédilection, Daisy Rickman réentrouvre l'âge d'or d'une pop introvertie qui telle celle émanant du celtique John Martyn ou de son frère d'armes Nick Drake, n'en oublie non plus pas d'être lumineuse.
L'auto-production à son zénith pour une artiste qui se mérite et est d'ores et déjà appelée à devenir culte.
L'auto-production à son zénith pour une artiste qui se mérite et est d'ores et déjà appelée à devenir culte.
En bref : on ne fera pas plus astral ou plus folk dans son recueillement que le Howl de Daisy Rickman en 2024. Tendrement recommandé à la communauté elfique de Lord Of The Rings. Et pas seulement.
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